Kafka chez Ubu : “L’Avocate et le Repenti” de Clarisse Serre, paru le 23 janvier 2025 aux éditions Sonatine.
Le pitch : “Parler, c’est rompre l’omerta.”
L’histoire vraie d’un repenti dans la tourmente : menaces de mort, vides juridiques, indiscrétions journalistiques. Un témoignage édifiant qui interroge notre rapport à la justice, par l’une des avocates les plus puissantes de France, conseillère pour les séries Engrenages et 66-5.
Lorsqu’elle le rencontre pour la première fois, Clarisse Serre ignore tout de lui. Son nom, son âge, ses origines, son casier judiciaire. Une seule certitude : l’homme est aux abois. Et il a désespérément besoin d’un avocat. Quand elle accepte de l’aider, la pénaliste est loin d’imaginer l’ampleur de la situation à laquelle son client fait face : menaces de mort, relations tendues avec la justice, vides juridiques, indiscrétions journalistiques, méfiance généralisée et fausse identité.
Qui est cet individu ? Un homme qui est passé aux aveux. Un homme dont la famille est en danger. Un homme qui a tout perdu, parce qu’il a décidé de collaborer avec la justice. À travers lui, Clarisse Serre va faire l’épreuve d’un statut, celui du repenti. Un statut encore mal identifié en France, et d’autant plus mal protégé, par les lois et la justice. Mais peut-on défendre un client, quand c’est tout le système qui fait défaut ?
Je vous pense nombreux à connaître Clarisse Serre pour avoir été consultante sur la série “Engrenages“. Pour ma part, je la connais dans le cadre professionnel. Elle est avocate, je suis greffière, nous sommes toutes les deux pénalistes, aussi nous avons eu des dossiers en commun. C’est donc à un exercice doublement inédit que je me suis essayé : Lire un essai judiciaire d’une autrice que j’ai déjà pu côtoyer. Qu’à cela ne tienne, je suis prête à relever tous les défis quand il s’agit de bouquiner !
Chroniquer une telle lecture ne m’est pas habituel, mais je vais faire de mon mieux pour vous en parler. A travers ce titre et sans trahir le moindre secret auquel elle est soumise, Maître Clarisse Serre nous présente la notion de repenti en droit français à travers sa propre expérience.
Donnant des surnoms aux différents protagonistes des affaires qui vont nous occuper pour ne jamais nous perdre, l’autrice met ainsi en lumière ce délicat statut et les failles du système judiciaire qui ne lui est décidément pas adapté, et peut même s’avérer inopérant voire carrément contre-productif. Pourquoi parler si c’est pour mettre sa famille et soi-même en danger ?
Pour s’y être elle-même heurtée, Clarisse Serre met dès lors le repenti à l’épreuve de la procédure pénale pour mieux en révéler les vides et les lacunes afin d’inciter notre législateur à réviser, réformer, remanier le régime actuel afin de le rendre plus neutre et indépendant, protecteur et efficient.
Face à la dure réalité, l’autrice interroge aussi son rapport à la justice et rappelle au passage l’essence même de la profession d’avocat… De la vocation d’avocat. Et celle qui nous écrit ici, d’une plume fluide et pédagogue, s’avère particulièrement investie et pleine de conviction. Passionnée par son métier malgré les difficultés.
En bref, Clarisse Serre nous propose un ouvrage très intéressant, et je remercie les organisateurs du Polartifice, salon du livre qui se déroulera au Touquet les 13 et 14 juillet, de m’avoir permis cette découverte !
