Un roman bouleversant, effarant mais nécessaire : “Un cri dans l’océan” de Benoît d’Halluin, paru ce 23 janvier 2025 aux éditions XO.
Le pitch : Dans le silence de la mer, des hommes lancent un cri…
Thaïlande, un soir de décembre. Arun, trentenaire d’origine cambodgienne, trouve refuge dans un bar d’un petit port de pêche, après s’être disputé avec son ami Olivier. Un homme lui offre à boire. Quelques heures plus tard, il se réveille sur un matelas dans une pièce fermée à clef, privé de papiers et de téléphone portable. La cale d’un bateau de pêche, en pleine mer…
Le lendemain, Olivier, sans nouvelles, est convaincu qu’Arun a choisi de disparaître. Mais, de retour à Paris, il tombe sur un cahier laissé par son ami. Ce qu’il y lit remet en question toutes ses certitudes. Il doit absolument trouver Arun. Il se lance alors dans une folle odyssée. De la mer de Siam à la méditerranée, de l’Atlantique à l’océan indien, Olivier affronte l’impunité du grand large, là où la violence frappe les mers comme les hommes.
C’est une enquête inédite du New York Times qui a alerté Benoit d’Halluin sur le trafic d’êtres humains en mer. Son roman raconte une histoire tragique et magnifique, tout à la fois cri de détresse et d’amour pour l’océan.
A vous je peux l’avouer, mes Bookinautes adorés : Bien que lectrice passionnée toujours à l’affut de nouvelles plumes, je ne connaissais pas Benoît d’Halluin avant d’apprendre que j’aurais l’immense plaisir d’animer une table ronde en sa compagnie au Salon du Livre de Saint-Raphaël, ceci aux fins d’évoquer son second roman en même temps que celui de Jérémie Claes. C’est ainsi que je me suis plongée dans cette lecture durant mes congés, avec toute mon ignorance et ma naïveté face à la mer des Caraïbes. C’est ainsi que j’ai entendu ce cri dans/de l’océan : C’est ainsi que j’ai découvert que l’enfer pouvait se nicher au cœur du paradis…
Au terme d’un prologue d’autant plus saisissant qu’on sait d’emblée que cette histoire s’inspire de faits réels, l’auteur nous propose un roman à l’intrigue aussi éprouvante que prenante, dénonçant bien des naufrages de notre monde moderne à travers ses personnages d’une crédibilité éblouissante. En effet, Benoît d’Halluin lève le voile sur l’esclavage en mer, véritable drame humain terriblement d’actualité et pourtant passé sous silence car méconnu du grand public. Thème central du roman, on se confronte à cette effroyable réalité à travers Arun, enlevé un soir d’errance dans un bar de Bang Saray, dont on suit le quotidien d’abord au fil du récit puis sous la forme d’un journal qu’il parvient à tenir à bord de sa prison flottante, dont on lit les extraits, nécessairement plus intimes, avec énormément d’émotions. C’est même un véritable déferlement dont on ne peut décidément pas sortir indemne.
Mais l’auteur ne s’arrête pas là, et s’attache également à mettre en lumière les ravages que causent les activités humaines sur l’océan, pourtant essentiel à notre planète comme à notre propre survie. Un sujet terriblement juste, qui semble particulièrement lui tenir à cœur, pour lequel on prend fait et cause avec lui tant il l’évoque avec puissance et sensibilité.
Si l’on s’attache inévitablement aux personnages, et notamment à Sophie, il nous faut évoquer son frère, Olivier, compagnon d’Arun qui permet aussi à l’auteur d’interroger la différence entre être et avoir, ce nécessaire besoin de réussir au lieu de vivre nous éloignant du bonheur. Tous ces protagonistes – fort bien croqués au demeurant – ont suivi des chemins bien différents et nous offrent l’opportunité d’une petite introspection personnelle par la même occasion… Est-il surprenant de constater que, si la Terre ne va pas bien, ses habitants ne vont pas bien non plus… ? Les bonnes questions doivent se poser…
Sans se priver d’un clin d’œil à Marc et Alexis, personnages principaux de son premier roman « Une nuit sans aube », l’auteur nous fait voyager, certes à travers le monde mais en accordant une place de choix (du cœur) à Nice et l’île d’Yeu, mais use surtout de sa plume fluide et captivante pour éveiller les consciences. En espérant qu’il y parvienne, son ouvrage se révèle, quant à lui, une émouvante réussite.
En bref, Benoît d’Halluin nous livre ici un roman tout à la fois poignant et révoltant, fort bien construit et documenté, d’une remarquable densité : Merci pour cette lecture riche et passionnante !