
Un thriller psychologique prenant et touchant : “Je ne suis pas d’ici” de Nathalie Lecigne, paru le 16 mai 2025 aux éditions de l’Oiseau Noir.
Le pitch : À huit ans, Marie arpente les terres de la ferme de Georges. Sous les coups du fermier, elle exécute ses tâches quotidiennes, tiraillée entre l’envie de fuir ce foyer qui n’est pas le sien et la peur de l’inconnu. Mais un jour, alors qu’elle tente de s’échapper, elle découvre un enfant terrifié dans la cave de la maison. Marie comprend alors que l’infamie de Georges et de son fils la lie irrémédiablement à cette terre hostile.
De son côté, François, dévasté par l’enlèvement de sa fille deux ans plus tôt, reprend pied et s’accroche aux moindres détails pour relancer l’enquête. Une piste dissimulée par ses propres parents relance la course contre la montre pour retrouver Pauline. Est-elle toujours vivante ?
C’est avec plaisir et curiosité que j’avais découvert la plume de Nathalie Lecigne l’an dernier grâce à Anthony (Les chroniques du polar sur Instagram), alors qu’elle publiait “Dans les bras de Typhée” en autoédition avec Librinova. Une lecture que j’avais beaucoup aimée, aussi étais-je ravie de la retrouver avec ce nouveau roman avant de la rencontrer IRL au Polartifice les 13 et 14 juillet prochains. Si je pense avoir préféré son précédent opus, il est indéniable que l’autrice a su me cueillir par une noirceur, dont j’aurais pu me douter mais à laquelle je ne m’attendais pas…
A travers cet ouvrage, l’autrice nous offre une terrifiante plongée dans les bas fonds de l’âme humaine, dans ce qu’elle recèle de plus sombre, mais aussi de plus ambivalent et de plus complexe. En dépit de quelques lenteurs, de quelques longueurs, le récit n’en demeure pas moins saisissant, éprouvant, bouleversant, parce qu’on pénètre dans une intimité que personne ne souhaiterait partager.
Si l’autrice sait nous tenir en haleine au gré d’une intrigue fort bien pensée, ce n’est pas tant l’action que la réflexion qui nous met sous tension. Parce que c’est indéniablement sur la psychologie des personnages que Nathalie Lecigne met l’accent. On rencontre d’abord brièvement Pauline avant d’alterner entre Marie et François. Marie, une enfant maltraitée, éreintée par les tâches dont elle doit s’acquitter quotidiennement au cœur d’une ferme qui n’est pas la sienne mais celle de son bourreau, Georges et son fils Louis. François, un père éploré qui n’est plus que l’ombre de lui-même depuis qu’on a enlevé sa fille il y a deux ans, alors qu’elle se trouvait en vacances chez ses grands-parents. Deux destins brisés dont on partage les pensées comme les ressentis, dont la personnalité est si travaillée, étoffée qu’on en arrive à éprouver de l’empathie. Au fil des pages et tandis qu’on accompagne chacun d’entre aux dans leur chemin de croix, on s’aperçoit que la vérité se révèle particulièrement sinistre, glauque et sordide… Mais pas si simple… Jusqu’à un dénouement qui nous terrasse.
Si la plume ne m’a pas particulièrement séduite, car plus en adéquation avec les dialogues que la narration, elle n’en demeure pas moins fluide et accessible. Portée par des chapitres courts, outre un style efficace et entraînant, la lecture n’en est que plus rapide et l’atmosphère qui s’en dégage oppressante pour longtemps.
En bref, la noirceur de l’humanité s’avère un puits sans fond d’inspiration, duquel Nathalie Lecigne a su nous proposer une intrigue redoutable et remarquable, construite à la manière d’un puzzle et servi par ailleurs dans un très bel écrin d’édition !