Chroniques 2025 \ Erreur de jugement d’Ariana Harwicz

Dans la folie du désespoir : “Erreur de jugement” d’Ariana Harwicz, traduit par Alexandra Carrasco, publié ce 04 septembre 2025 aux éditions Dalva.

Le pitch : Lisa n’a plus rien à perdre : elle a laissé derrière elle son pays – l’Argentine – pour vivre le grand amour dans un coin perdu de la campagne française, vu l’amour disparaître, les sentiments devenir haine et surtout, a perdu la garde de ses enfants. Lui reste une rage insatiable, un besoin viscéral de voir, toucher, sentir ses petits qu’on ne l’autorise à serrer dans ses bras que deux fois par mois. Alors Lisa commet l’impensable : elle kidnappe ses enfants et s’enfuit avec eux, roulant au hasard, allant vers la mer.
Dans ce roman au rythme effréné, Ariana Harwicz nous immerge dans le monologue sauvage de Lisa, sa cocotte-minute intime, soulignant toute la violence de cette vie familiale, celle des ruptures, de l’incompréhension entre les êtres et les cultures. On referme ce brûlot avec un léger vertige et l’impression saisissante d’avoir été, pour quelques heures, complice de cette femme au bord de l’abîme.

C’est dans le cadre du salon des Livres dans la Boucle de Besançon que j’ai découvert la plume de cette autrice argentine, que j’aurai la chance et le plaisir de rencontrer en table ronde pour cet ouvrage tandis que l’adaptation de son précédent roman traduit en France s’invite prochainement dans les salles obscures…

Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’autrice nous enivre autant qu’elle nous déroute avec l’histoire de cette femme au bord du gouffre, sombrant dans la déraison parce qu’il lui est inconcevable d’être privée de ses garçons par un magistrat qui a confié ces derniers à leur père.
C’est ainsi qu’on se retrouve entraîné sans désemparer dans ce road trip éperdu, au gré d’une intrigue tumultueuse et bouillonnante, pris au piège d’une tragique logorrhée intérieure, complice bien malgré soi d’une mère perdant pied, dont on ne partage pas les choix mais dont on perçoit la détresse immodérée, témoin que l’on est de ses propres tourments, d’une violence du quotidien sinistrement banalisée et terriblement actuelle.
Au-delà d’un titre fort éloquent, audacieux et judicieusement trouvé, le sujet est lourd, plus complexe qu’il n’y paraît, le texte se révèle volontairement oppressant, court mais éprouvant, le rythme est effréné, le style virulent, aussi viscéral que le besoin que cette maman a de ses enfants.

En bref, c’est un livre tout à la fois singulier et fiévreux qu’Ariana Harwicz nous propose ici… Je suis curieuse de savoir si “Crève, mon amour” s’avère du même acabit.

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