
Ceci est un avertissement : “Nerona” d’Hélène Frappat, paru le 20 août 2025 aux éditions Actes Sud.
Le pitch : Au cœur de l’Europe, une dictatrice déchaînée, qui exige d’être appelée “le Prince”, règne sur sa nation à coups de décrets. Son nom ? Nerona. Paranoïaque, autoritaire, climatosceptique, égérie de l’efficacité gouvernementale et pourfendeuse de toutes les “déviances”, la fondatrice du feu (Force, Énergie, Union) a tout pour plaire. La preuve : le peuple l’a portée au pouvoir. Viva Nerona !
Parmi les nombreux ouvrages de la rentrée littéraire cette année figurait ce bref ouvrage, qui m’a été confié en vue d’une table ronde avec l’autrice au salon des Livres dans la Boucle de Besançon… Si “Lady Hunt” patiente également dans ma PAL, je n’avais encore rien lu d’Hélène Frappat et, en bonne dictatrice qui se respecte, c’est évidemment “Nerona” qui s’est imposé à mes yeux… Et sacré nom d’un bouquin, les copains, en voilà une lecture hors du commun !
Car s’il s’agit bel et bien d’une fiction, toute ressemblance avec des personnes réelles est, je pense, immanquablement souhaitée et assumée ! En écrivaine inspirée tout à fait consciente de la réalité, Hélène Frappat use de la littérature et nous offre ainsi une fable satirique des plus acides pour mieux nous alerter, pour mieux nous faire réagir des dangers qui nous guettent dans l’ombre, nous entraînant dès lors dans une aventure absolument glaçante pour mieux éviter l’embrasement de la France, de l’Europe, du monde qui ne tourne déjà plus rond depuis un moment.
En effet, Hélène Frappat nous dresse l’incroyable portrait de Nerona, chef d’Etat élu par le peuple de façon démocratique, une femme outrageusement ambitieuse et paranoïaque (pour ne pas dire carrément tarée) qui se fait appeler le Prince et prône la Famille pour prendre des décisions complètement folles à grands coups de décrets et installer un régime autocratique sans en avoir l’air. C’est simple, elle a tous les défauts, mais elle sait parler, manipuler les masses avec ses grands discours, évoquer un passé remasterisé pour endormir les foules et faire tout accepter, même l’inacceptable… Surtout l’inacceptable.
C’est absolument grotesque et ahurissant… Et pourtant la tragicomédie revêt trop de crédibilité, rappelle un peu trop l’actualité pour ne pas inquiéter… Pour ne pas terrifier. Car il suffit d’une étincelle pour que le “FEU” puisse se propager et tout détruire sur son passage. Il sera alors trop tard pour se poser la légitime question “Qu’avons-nous fait ?” C’est un pamphlet cruel et grinçant mais terriblement juste et intelligent, qu’il ne faut pas ignorer.
En bref, je suis ressortie complètement abasourdie de ce conte à l’humour noir mais angoissant, horrifiant, saisissant… Un homme averti en vaut deux : Vous ne pourrez plus dire que vous ne savez pas ce qui nous pend au nez désormais…