“L’horreur ne va pas sans l’imagination” : Un œil dans la nuit de Bernard Minier, paru ce 06 avril 2023 aux éditions XO.
Le pitch : Dans les montagnes, retiré du monde, un réalisateur de films d’horreur, Morbus Delacroix. Culte, misanthrope, fou. Parmi ses fans, une étudiante en cinéma. Fascinée, intrépide, inconsciente. À Toulouse, un as des effets spéciaux est retrouvé mort, ligoté sur un lit d’hôpital. Et si ce meurtre trouvait sa source dans un film maudit ? Pour le commandant Martin Servaz, peut-être la plus grande énigme de sa carrière… Cet œil dans la nuit n’a pas fini de vous fixer.
Vous me connaissez mes Bookinautes adorés, je ne sollicite aucun service presse. Aussi vous n’imaginez pas ma surprise à la réception de ce livre en avant-première, accompagné d’un charmant petit mot de l’auteur qui m’a beaucoup touchée. Je débuterai donc cette chronique en remerciant très chaleureusement Bernard Minier ainsi que les éditions XO pour ce beau cadeau… Ou plutôt cette invitation au cauchemar à laquelle j’ai succombé sans la moindre hésitation !
J’étais pourtant plus que préparée à basculer dans l’horreur, Bernard Minier nous l’avait dit, conté et répété, depuis janvier à Lille lorsque je participais à un formidable évènement littéraire organisé conjointement par les éditions Pocket et le Furet du Nord avec le Crédit Agricole Nord de France à l’occasion des Nuits de la Lecture jusqu’aux Quais du Polar à Lyon lors de différents échanges en passant par les éléments du dossier presse reçu avec le roman. Préparée donc, oui. Prête pour autant ? Non !
En effet Bernard Minier a visionné plus de 200 films d’horreur pour l’écriture de cette nouvelle aventure du Commandant Martin Servaz : Alors autant vous dire qu’il maîtrise son sujet comme jamais et nous y plonge la tête la première sans nous laisser la moindre possibilité de prendre notre inspiration, n’épargnant rien ni personne… Surtout pas ses personnages et encore moins ses lecteurs !
Ainsi Bernard Minier nous entraîne à sa suite au cœur d’une intrigue complexe et redoutablement bien ficelée, qui nous saisit d’effroi dès les premières pages tournées, dont il a soigné chaque détail, allant bien au-delà du bon roman bien fagoté. Plus qu’un auteur, Bernard Minier se fait metteur en scène et réalisateur, il commence par vous nimber d’une atmosphère lugubre, sinistre, glaçante et oppressante… Vous voici dès lors exposés, vulnérables… En danger. Et si vous aviez la possibilité de fermer les yeux au cinéma ou dans votre canapé, vous n’aurez même pas cette échappatoire entre ces pages obscures !
Incroyablement riche d’informations, références et autres anecdotes démontrant sans appel l’impressionnant travail de recherche fourni par l’auteur, l’intrigue est aussi menée à un rythme soutenu par une poignée de personnages fort bien croqués et fascinants voire envoûtants. Si l’histoire est folle, les personnages le sont tout autant, et nombre de scènes se révèlent ainsi particulièrement fortes, s’impriment sur notre rétine et se gravent dans notre mémoire pour un récit dont on ne sort pas indemne, pas plus que nos protagonistes, à commencer par Martin Servaz lui-même…
Mais au-delà de la thématique de l’horreur dont Bernard Minier s’empare à la perfection, celui-ci semble aussi aborder la liberté de façon plus subtile et insidieuse. La liberté de ton, la liberté d’expression, la liberté de création : Une aubaine quand il s’agit d’aborder l’horreur dans le cinéma à travers un roman… Tout n’est alors qu’illusion… Ou pas… Jetant dès lors un regard sans fard sur notre société et ses déviances dans lesquelles les hommes ne peuvent décidément pas s’empêcher de verser.
Quoi qu’il en soit, on sent et ressent le plaisir qu’a pris l’auteur à écrire ses pages de sa plume fluide, addictive et terriblement visuelle, plaisir contagieux qu’on partage à la lecture maintenant que le bouquin se trouve entre nos mains fébriles et sous nos yeux horrifiés, qu’on gardera bien ouverts une fois la dernière page tournée et cette fin… Dont nous reparlerons de vive voix, M. Minier !
En bref, Bernard Minier n’aborde pas le cinéma d’horreur à travers ce roman, non. Il s’en empare, il se l’approprie comme seuls les maîtres du genre savent le faire… Et le résultat est plus efficace que les plus gros blockbusters en la matière : Chapeau l’artiste !
Il faut vraiment que je continue de lire cet auteur !
Bonne journée.