Un livre face auquel j’ai perdu le combat sur le Ring de son éditeur… Un livre dont le chaos s’est emparé de mon cœur et de mon âme pour les massacrer… Un livre que je ne suis décidément pas de taille à chroniquer… Seulement j’essaie : “Dynamique du chaos” de Ghislain Gilberti aux éditions Ring et désormais en format poche avec La Mécanique Générale.
Le pitch : Pour mieux s’éloigner de son passé, fuir la réalité et oublier celle qu’il aime autant qu’elle le détruit, Gys multiplie les excès avec Manu, Céline et Vanessa, ses potes de la “Génération Nada” pour mieux s’enfoncer dans le néant… Aussi écument-ils les bars miteux et les soirées louches ou sexe, drogue, alcool et violences en tous genres sont de la partie… Seulement on n’échappe pas à soi aussi facilement, on ne trouve pas d’issue à sa vie sans souffrir, surtout quand son grand amour vient à nous rattraper au plus profond de notre abyme…
“Avec toute ma plus profonde gratitude et mes meilleurs sentiments, voici le texte le plus sombre et chaotique que j’ai pu écrire. Un voyage dans un passé aussi douloureux que poétique, aussi trash que bourré de sentiments. Bienvenue au cœur du chaos… Amitiés sincères. G. Gilberti aka « Gys »“. C’est ainsi que l’auteur me souhaitait la bienvenue dans son univers au Salon du Livre de Genève l’année dernière… A cette époque je ne connaissais l’auteur qu’à travers les violentes agressions dont il avait malheureusement été victime, aussi souhaitais-je justement découvrir en quoi un auteur si sympathique pouvait tant déranger, me faire moi-même une opinion s’agissant de sa plume et de sa prose… Partie sur l’idée de me procurer “Le Festin du Serpent“, c’est avec celui-ci que je suis finalement repartie… Pourtant ma lecture a tardé, trop tardé, enfouie qu’elle était sous une véritable montagne d’autres livres… Peut-être qu’inconsciemment je sentais le danger me guetter au plus profond de ses pages…
Inspiré de faits réels comme l’indique sobrement la couverture, l’auteur nous rédige en fait le roman de sa vie, distillant ici divers vestiges de sa propre histoire. Ceux qui n’y verront là qu’un amas de scènes choquantes et voyeuristes ne savent pas lire. Si un livre a une âme, celui-ci contient celle de Ghislain… Une âme déchirée par son passé, torturée par la vie, sans doute laissée pour morte après tant de luttes acharnées face au destin, mais qui parvient à se reconstruire en se livrant à corps perdu dans l’écriture… Car l’auteur a incontestablement écrit avec son cœur, avec ses tripes, sans filtre aucun, de manière abrupte et directe pour nous plonger dans son intimité chaotique…
Et le lecteur dans tout ça ? Le lecteur sait d’emblée que ça va piquer… L’auteur ne le prend pas en traitre et le prévient en l’introduisant dans son récit… Alors oui, le lecteur sait… Mais il a ce réflexe humain d’aller vérifier par lui-même, de se frotter au danger, de se faire mal pour constater les dégâts… Alors il se plonge dans ce roman sans retenue aucune, il s’y jette à corps perdu pour suivre Gys dans les ténébreuses profondeurs de son univers… Si vous pensiez avoir touché le fond, vous comprendrez bien vite que même l’enfer a ses cachots avec Gys…
Usant et abusant de tout ce qui peut anéantir un homme normalement constitué, Gys tente la guérison par l’autodestruction, la renaissance par l’annihilation… Mais là où certains veulent se détruire à petits feux, Gys y va directement au lance-flammes, c’est bien mieux : Plus douloureux et radical, plus efficace et fatal. Parce qu’on trouve bien pire que la fiction dans cette dure réalité, on y côtoie le sexe et la violence, la drogue et l’alcool… La mort sous toutes ses coutures et toutes ses formes. Et le lecteur, résilient, accepte les coups sans faillir ni broncher, se laisse ainsi malmener pour ressortir fourbu et esquinté, d’apparence sans aucun bobo mais intérieurement pulvérisé en poussière de chaos, anéantie par le mal être qui a déjà rongé Gys de manière irréversible. Mais parce qu’il faut sans doute avoir mal et peur pour se sentir vivant, Gys en devient finalement le plus humain d’entre nous, le plus vivant aussi. Il nous a ouvert sa réalité, et nous avons sombré dedans, sans tergiverser.
Telle une drogue dure, cette lecture est addictive et destructrice, forte d’une plume vive et acérée, un style nerveux et puissant pour une lecture d’une rare, très rare intensité…
En bref, un roman puissant dont je ne suis pas revenue, tant celui-ci m’a démolie… Il faut le lire !