The place to read… Avec Frédéric Somon et Boris Sciutto

Chers Bookinautes, bonjour ! L’été vient de faire son entrée… Aussi nous allons tenter de nous reposer un peu au terme d’une folle saison aussi captivante que mouvementée avant de nous retrouver pour une rentrée que j’annonce d’ores et déjà passionnément littéraire !
Mais une saison ne saurait s’achever en beauté sans une jolie petite série d’interviews et autres activités livresques… Le BiblioLive s’est mis en pause après une dernière émission réalisée le 29 juin dernier, la DreamBookGazette vient tout juste d’en faire de même… Et c’est précisément dans ce cadre que je vous offre une dernière interview croisée avant la reprise en septembre !
Ici deux auteurs s’apprêtent à vous parler de leurs romans respectifs, deux bibliographies qui présentent de légères ressemblances… Mais tellement plus de différences à (re)découvrir au gré de leurs réponses !
Aujourd’hui j’ai la chance et le plaisir de recevoir Frédéric Somon, auteur de plusieurs romans publiés chez M+ Editions et notamment “Quand la Dombes tue” ainsi que Boris Sciutto, également auteurs de plusieurs romans publiés aux Presses du Midi, dont “Noël au Balcon” : Tous deux m’ont accordé le privilège de répondre à mes petites questions, je vous laisse à présent découvrir nos échanges… Bonne lecture et belle rencontre !

NB : La lecture de cet article sera plus fluide et agréable en version PC.

Que diriez-vous pour vous présenter en quelques mots ?
Gendarme au plus profond de mon être, j’y ai consacré plus de 40 années (36 ans en service actif et 6 ans dans le cadre de la réserve opérationnelle de la gendarmerie) dont une grande partie dans l’exercice de la police judiciaire.
Retraité, je continue d’œuvrer au profit du Ministère de la Justice en qualité de délégué du Procureur, quelque part dans le Sud.
Marié depuis 45 ans, père de deux enfants et grand-père de quatre petits-enfants, je suis un homme heureux.

Que dirais-tu pour te présenter en quelques mots ?
En quelques mots, je m’appelle Boris, j’ai 40 ans, je suis policier depuis presque 20 ans, dont 8 ans dans le 93. J’aime le sport, le cinéma, la lecture et l’écriture, notamment.

Gendarme avant d’être romancier : Comment passe-t-on du flingue à la plume ? D’où vous est venue l’envie d’enquêter sur papier ?
J’ai toujours un peu écrit. Déjà à la fin de mon adolescence, quand j’étais marin (de 17 à 21 ans), je profitais des longues traversées sans apercevoir un bout de terre pour écrire (La solitude aiguise toujours un peu l’inspiration). Du haut de mes 17 ans, je jetais des mots, certainement maladroits sur le papier avant de les laisser s’envoler au vent comme d’autres jettent une bouteille à la mer.
Mais ce fut un gendarme Marc L., officier supérieur et véritable touche à tout (écrivain, poète, musicien et peintre) qui m’a mis véritablement le pied à l’étrier après avoir lu quelques-uns de mes textes. C’est lui qui s’est chargé de les faire éditer (autoédition). C’était mon premier ouvrage – « Le Grand Voyage » chez BoD – un recueil de textes sur la déclinaison de l’Amour.

Policier avant d’être romancier : Comment passe-t-on du flingue à la plume ? D’où t’es venue l’envie d’enquêter sur papier ?
Je ne suis pas rentré dans la police par conviction, mais presque par hasard. Et comme le hasard fait bien les choses, j’ai compris que je ne m’étais pas trompé de voie. C’est un métier absolument intéressant et varié, même s’il est dur psychologiquement. J’ai toujours eu beaucoup d’imagination et, au fil de mon parcours professionnel, mélangé à mes lectures (policières, bien entendu), mon cerveau mettait en place des scénarios. Un jour, j’ai décidé de mettre à l’écrit ce que ma tête gardait en elle depuis longtemps.

Auteur de polars et déjà plusieurs crimes littéraires à votre actif : Pouvez-vous nous présenter votre bibliographie ?
Tout d’abord « Les Dessous de soie » introduit le gendarme Deschamps au tout début de sa carrière. C’est cette enquête criminelle qui le propulsera dans une section de recherche de la gendarmerie. Dans ce livre, j’évoque une famille Weston en me référant à une branche de ma famille : les West. Mon ancêtre Robert West (né en 1794 à Enderby (Angleterre) a, fin 1816 avec James Clark, clandestinement, démonté ses métiers à tisser la tulle pour les faire acheminer en France, dans plusieurs ports de la Manche pour ne pas éveiller les soupçons car, à l’époque l’exportation des machines anglaises était prohibée et punie de déportation. C’est à Calais qu’il a créé son usine et très vite son savoir-faire lui vaut une reconnaissance au plus haut niveau. Dès 1816, son nom figure dans les archives de Saint Pierre lès Calais (62).
Rapidement la maison West a su acquérir une très grande réputation par sa façon de produire des articles en tous points irréprochables. Il a été un des premiers à faire des grandes laizes espagnoles avec un succès qui, loin de diminuer, n’a fait qu’augmenter et laisser un rayon lumineux dans le ciel de l’industrie du tissage. Robert West a toujours recherché une spécialité dans les laizes à pois dentelles et pois en relief pour voilettes. C’est lui le premier qui, en 1864, a fabriqué le pois en relief et a créé le point dit d’Aurillac. Il a été honoré de la Légion d’honneur, remise par le Président de la République de l’époque qui s’était déplacé dans son usine.
Ensuite vient mon roman « Quand la Dombes tue ». Deschamps fait connaissance avec d’autres enquêteurs qui deviendront récurrents. Cet opus fut primé aux Acadénimes du Polar en mai 2022.
Puis j’ai publié « La chimère de la Dombes ». Cet opus a été sélectionné par CNews parmi les six polars de la rentrée littéraire 2021-2022 !
S’agissant de mes futurs romans, il y a « L’Orphelin de Morthemer » (titre non encore définitif) : le livre est actuellement chez M+Editions et paraîtra au début de l’année 2023. Ce livre tout à fait différent évoque les colonies pénitentiaires agricoles au 19ème siècle en France. Je raconte l’enfance puis l’adolescence d’un orphelin qui a été placé à 4 ans dans un orphelinat qui, malheureusement pour lui, vient d’être transformé en établissement pénitentiaire pour criminels et délinquants mineurs.
En ce moment, je suis dans l’écriture du 5ème avec un titre encore provisoire Ichthus. Je ne vous en dis pas davantage !

Auteur de polars et déjà plusieurs crimes littéraires à ton actif : Pourrais-tu nous présenter ta bibliographie ?
J’ai écrit mon premier roman, « Black out », en 3 jours. L’histoire était limpide pour moi et je ne m’arrêtais plus d’écrire. J’ai décidé de tenter ma chance au Prix du quai des Orfèvres, mais j’ai rapidement été évincé car il y avait un nombre de pages à respecter et je n’avais pas fait attention à cela. Dans le courrier standard que j’ai reçu du jury, il y avait une mention manuscrite m’encourageant à continuer car ils aimaient ce que j’avais écrit. Ma femme m’a encouragé à démarcher une maison d’édition. Je me suis rendu aux « Presses du Midi », je leur ai présenté mon ouvrage et ils ont immédiatement adhéré à mon style, me faisant signer un premier contrat.
La même année, j’écrivais « Noël au Balcon », premier opus des aventures d’Archibald. S’en sont suivis « Un fauteuil à la mer » qui a figuré parmi les finalistes du Prix de l’évêché 2021 et « Mo(r)t compte double » cette année, qui sont les deux tomes suivants de mon récurrent commandant.

Plusieurs romans mais un personnage récurrent : Comment le décririez-vous ? Y a-t-il un peu de vous à travers celui-ci ?
Je veux toujours, dans mes livres, mettre en valeur la gendarmerie et toutes ses composantes. Avec mon personnage central, Dominique Deschamps, je décris finalement le parcours du jeune gendarme sortant d’école de gendarmerie et attiré par l’exercice de la police judiciaire qui, je le rappelle, représente presque 50% de l’activité globale de la gendarmerie.
Je décris son parcours ascensionnel, de la brigade territoriale traitant de la petite et moyenne délinquance jusqu’à la section de recherche où les enquêtes concernent la grande criminalité. Deschamps a un caractère fort, il sait ce qu’il veut, notamment lorsqu’il flirte avec la ligne rouge, mais toujours avec une farouche volonté d’œuvrer pour la vérité. Son combat contre le crime le conduit à quelques excès que la paternité saura calmer. Il y a forcément un peu de moi dans cet enquêteur, j’ai suivi le même parcours en gendarmerie : gendarme affecté en unité territoriale puis gradé et officier dans des unités spécialisées de la police judiciaire en Rhône-Alpes, Occitanie et Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Plusieurs romans mais un personnage récurrent : Comment le décrirais-tu ? Y a-t-il un peu de toi à travers celui-ci ?
Archibald apparaît dans trois de mes quatre romans. J’avais envie de faire vivre plusieurs aventures à un seul « enquêteur », tout en développant son environnement et son entourage au fil du temps. C’est une expérience vraiment intéressante, totalement différente d’une rédaction de « one shot ». Il y a évidemment un peu de moi dans Archibald, mais il représente surtout le flic français actuel, dans sa vie personnelle et les déboires que l’on connaît tous, mais aussi dans son environnement professionnel avec ses hauts et ses bas. Beaucoup de policiers que compte mon lectorat s’identifient parfaitement à Archibald et son univers, car il est celui d’un policier français dans son quotidien le plus concret.

En région lyonnaise, votre enquêteur semble suivre vos pas : En quoi était-ce important pour vous ?
On ne décrit bien que ce que l’on connaît parfaitement. Pour mes enquêtes, j’ai traversé la région lyonnaise de long en large, et Lyon est une ville que j’adore. Il m’était facile de m’y projeter pour y placer mes romans noirs. De plus, en positionnant quelques crimes dans la Dombes, je me servais de la physionomie particulière de cette région, entre mille étangs, bois et brouillard, il y avait largement la place pour un climat anxiogène. Mais, je rassure les lecteurs, la Dombes est une merveilleuse région pour les amateurs de pêche en eau douce, les ornithologues et les amateurs de flore et de faune, de calme et de nature.

De Paris à Toulon, ton enquêteur semble suivre tes pas : En quoi était-ce important pour toi ?
J’ai toujours voulu écrire sur ce que je maîtrisais. Tant dans la profession que dans les décors. Je suis un grand amoureux de Paris et je suis Toulonnais de naissance. Il était normal qu’Archibald suive mes pas pour que je transpire un maximum d’émotions en lui à travers mon parcours.

Dans quelle mesure votre propre expérience professionnelle vous a-t-elle inspiré pour imaginer vos romans policiers ?
Je n’écris jamais sur des affaires criminelles dont j’aurais eu à connaître ou à traiter en qualité de directeur d’enquête. Cependant, mon expérience professionnelle est mise à profit pour décrire ce qu’il se passe dans le cerveau des enquêteurs évoluant entre difficultés, craintes, doutes et satisfaction lorsqu’ils mettent les menottes à un auteur pour le remettre à la justice.

Dans quelle mesure ta propre expérience professionnelle t’a-t-elle inspiré pour imaginer tes romans policiers ?
J’ai la chance d’avoir le plus beau des supports pour écrire un roman policier. Je suis entouré de flics de tous les services, j’ai une base de données infinie à portée de main, qui me permet d’écrire au plus proche de la réalité, car c’est à chaque fois mon objectif. Si vous êtes policier, je veux que mes romans vous ramènent à votre quotidien. Si vous êtes un civil, je veux que ma lecture vous plonge en immersion dans le domaine de l’investigation. Je ne suis pas un grand littéraire, mais j’ai une écriture standard qui s’adresse au plus large des publics, c’est ce qui plaît parce que je n’utilise pas un langage pointilleux et rébarbatif. Le lecteur ne se perd pas dans les couloirs de ma Police.
Toutes mes histoires sont fictives, mais je me sers de mon vécu, de voyous ou collègues que j’ai côtoyés, de scènes et lieux atypiques qui m’ont marqué.

Diriez-vous que l’écriture a pu vous servir de catharsis ?
Je ne vais pas parler d’Aristote ni de psychologie. Comme je n’évoque jamais mes propres dossiers criminels, je n’ai aucun démon à chasser au travers de mes thrillers. Toutefois, lorsque je décris les insomnies récurrentes, je sais ce à quoi je fais allusion et nul doute que mes camarades gendarmes ou policiers le comprennent parfaitement. Les crimes horribles auxquels nous faisons face laissent des traces certes invisibles, mais qui resteront à jamais gravées dans nos mémoires. La réalité de nos métiers très difficiles est malheureusement trop méconnue du plus grand nombre. Tous, quel que soit le grade ou l’affectation, méritent un immense respect.

Dirais-tu que l’écriture a pu te servir de catharsis ?
L’écriture est la plus saine des thérapies. Notre profession nous brûle au quotidien, tant par les interventions que par le côté hiérarchique et politique. Nous sommes confrontés à ce que l’homme à de plus néfaste et nocif, notre tête, notre cœur et notre corps sont soumis à rude épreuve en permanence. Ecrire m’a permis de régler certains comptes avec la profession, avec la vie, avec l’injustice. L’écriture me permet de vivre dans un monde qui est un reflet de la réalité, mais dans lequel j’ai une liberté totale d’action et d’expression. Lorsque je suis devant mon clavier, je sais que je vais pouvoir agir sans être bridé, en toute liberté, et c’est peut-être à travers mes écrits que je suis le plus authentique.

Une bibliographie bien fournie accueillie chez M+ éditions : Peux-tu nous parler de ta maison d’édition ?
M+Editions est une jeune maison d’édition lyonnaise dirigée par Marc Duteil, un directeur de publications ouvert, respectueux et attentif à ses auteurs. Être édité reste le graal et tous les auteurs connaissent ou ont connu le parcours du combattant entre les Maisons d’édition qui ne répondent jamais et celles qui rejettent les tapuscrits sans les avoir ouverts. J’en parle en connaissance de cause après avoir piégé certains des miens pour savoir s’ils avaient été, a minima, ouverts. Bref, j’enfonce là une porte ouverte.
Donc, merci à Marc d’avoir ouvert les portes de M+Editions, je lui en suis reconnaissant. Si je rajoute à cela qu’il n’hésite jamais à échanger avec les auteurs pour la mise en édition des livres, je ne peux qu’être heureux de partager avec lui cette aventure.

Une bibliographie bien fournie accueillie aux Presses du Midi : Peux-tu nous parler de ta maison d’édition ?
« Les Presses du Midi » sont une maison d’édition toulonnaise que je respecte énormément. Je leur en serai éternellement reconnaissant de m’avoir donné ma chance et, depuis deux ans, il y a eu un changement de propriétaire. La nouvelle patronne, Hélène de Pena, est un modèle de persévérance. Elle s’investit corps et âme pour que la maison d’édition se développe et perdure, au milieu des noms les plus prestigieux. Grâce à eux, j’ai la chance chaque année de participer aux Fêtes du livres de Toulon et Hyères, ainsi qu’à d’autres grands salons locaux. À mon niveau, j’essaie de contribuer à l’évolution des Presses du Midi, car je leur dois beaucoup, je trouve normal de pouvoir les aider dans leurs projets. J’ai la chance d’avoir noué certains contacts avec des auteurs ou organisateurs de salons dans d’autres régions, je me suis empressé de les mettre en contact avec Hélène de Pena pour qu’ils échangent et partagent certaines idées ou certains projets. C’est vraiment important pour moi de faire partie de leur aventure, c’est une équipe dynamique qui mérite d’être connue et reconnue pour son travail. Ils donnent leur chance à des auteurs locaux et leur permettent réellement de s’exposer au public. C’est un travail de longue haleine et ils sont vraiment méritants.

Avez-vous déjà des idées pour vos prochains écrits, vos prochaines enquêtes ? Quels sont vos projets littéraires à venir ?
Je suis déjà dans l’écriture du prochain thriller dans lequel le trio récurrent d’enquêteurs apparaitra encore et, début 2023, sera édité le prochain livre qui traite des colonies pénitentiaires agricoles au 19ème siècle en France. Ce projet de livre a déjà reçu d’excellents retours de premiers lecteurs.
Pour conclure, je suis un auteur comblé puisque mon premier thriller « Quand la Dombes tue » a été primé par les Acadénimes du polar début mai 2022, le deuxième « La Chimère de la Dombes » a été sélectionné par CNews parmi les six polars de la rentrée littéraire 2022 en se classant à la 3ème position. Mon troisième livre « Les Dessous de Soie », qui vient de paraître, fait l’objet d’excellents retours de lecture. Je profite de cet entretien pour remercier infiniment les lectrices et les lecteurs. Sans eux, je n’existerais pas. J’ai créé une page Facebook pour pouvoir échanger avec eux en direct et sans langue de bois. J’apprécie particulièrement nos conversations.
Merci à vous pour votre passion et votre énergie pour faire connaître des auteurs.

As-tu déjà des idées pour tes prochains écrits, tes prochaines enquêtes ? Quels sont tes projets littéraires à venir ?
Mon dernier roman est sorti il y a peu, mais il est possible qu’une nouvelle enquête soit publiée en fin d’année ou début d’année prochaine. J’ai de nombreux projets d’écriture, des histoires plein la tête, et l’envie de me perfectionner dans mon style d’écriture. J’ai la chance d’être bien entouré et encouragé, ça me permet de croire que je ne me suis pas trompé en choisissant le roman policier.

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