Il était un Indé… Et c’est Laurine Valenheler !

Mes petits Bookinautes chéris : C’est par un “bonjour” ensoleillé que je vous salue aujourd’hui !
Déjà parce que c’est effectivement un dimanche ensoleillé, y compris dans les Hauts-de-France, et même plus précisément en Picardie – c’est tellement plus joli !
Egalement parce qu’il nous faut savourer ce premier week-end déconfiné… Cette liberté de circulée retrouvée… Ce retour en librairie accordé… Je ne sais pas vous, mais quand bien même il me faut porter un masque et des gants pour en profiter, je ne vous cache pas que je suis une lectrice comblée !
Mais si mon “bonjour” respire le soleil et la joie de vivre, c’est aussi parce qu’il signe présentement le retour d’une petite rubrique que j’affectionne tout particulièrement, spécialement consacrée à l’autoédition et ses auteurs de talent qui ont le courage et la témérité d’œuvrer en solitaire d’un bout à l’autre de la chaîne littéraire pour vous offrir du plaisir en pages et autres merveilleux moments de lecture à consommer sans modération ! Et si je ne peux malheureusement plus leur accorder autant de temps que je le souhaiterais, il me tient vraiment à coeur de pouvoir les soutenir et leur offrir davantage de visibilité pour vous les faire découvrir : Ce n’est peut-être pas grand chose mais c’est toujours plus que rien du tout, n’est-il pas vrai ? Alors trêve de bavardages : Entrons dans le vif du sujet !
Parce que cette période de confinement m’aura tout de même permis de bouquiner plus qu’à l’accoutumée, c’est à cette occasion que j’ai pu me plonger dans un polar hors du commun dont je vous ai parlé dans une chronique le 02 avril dernier, un premier roman que j’ai grandement apprécié d’une jeune auteure qu’il me fallait absolument vous présenter après l’avoir assaillie de questions pour satisfaire ma curiosité… Et la vôtre par la même occasion, vous savez bien que j’aime partager !
Ce grand jour étant maintenant arrivé, j’ai maintenant le plaisir de laisser la parole à Laurine Valenheler, jeune autrice du livre “Ils se marièrent et il y eut beaucoup de sang” : Bonne lecture et belle découverte à tous !

Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Aloha !
Je m’appelle Laurine Valenheler, j’ai vingt-trois ans – soit l’âge d’un fœtus si l’on opère des statistiques dans le petit monde littéraire – et je suis une franc-comtoise très enthousiaste quant à ses racines provinciales, expatriée en région parisienne par amour et pour le travail.
Après avoir suivi des études de langues et linguistique (qu’on pourrait sous-titrer : “cursus de saltimbanque spécialité Pôle Emploi”), j’ai travaillé quelques mois comme agent d’accueil et d’accompagnement aux victimes dans un commissariat de police de la banlieue parisienne pour finalement revenir à mes premières amours que sont la correction de langue française et la traduction. J’occupe depuis bientôt un an un poste de correctrice dans un cabinet d’audit de qualité de service… jusqu’à mon prochain coup de tête professionnel. Je milite également, pacifiquement toujours, au sein d’associations pour promouvoir les idées féministes et en faveur des droits aux personnes LGBT qui sont les miennes. J’ai parfois une grande gueule sur les sujets qui engagent de l’injustice selon moi, un parler assez brut de décoffrage qui détonne parfois en “société”, mais je ne mords jamais et reste toujours ouverte aux débats d’idées.
 
D’où t’es venue l’envie d’écrire ?
C’est cliché, mais je crois qu’elle a toujours été là. L’écriture m’habite, je n’imagine pas une seule seconde ma vie sans, alors que je suis loin d’être une auteure très prolixe comme certains le sont. Seulement, dans un coin de ma tête, j’invente des histoires au quotidien, dans les plus petits et insignifiants moments de la vie, et surtout je note des bribes de phrases et d’expressions sur des carnets que je replace dans le contexte très précis que j’avais souvent imaginé en amont au moment de passer à la rédaction.
J’ai commencé à écrire très très tôt, avant de rentrer au collège je dirais, et j’ai accouché de mon premier brouillon de roman à 11 ans. C’était confus, dégueulasse sur le plan syntaxique et stylistique, bourré d’idées préconçues mais le thème de la violence conjugale était déjà abordé sur environ 150 pages. Quand j’y repense, j’étais touchée par ces thématiques avant même d’être femme…
 
Quelles sont tes sources d’inspiration ?
Le quotidien, les rencontres (qu’elles soient littéraires, audiovisuelles ou humaines), les indignations, les combats menés… Je ne crois pas pouvoir dire qu’un auteur de fiction en particulier a provoqué le déclic. Si j’ai des influences littéraires, elles sont très diluées et diverses : je fonds d’amour depuis très longtemps pour le théâtre d’Alfred de Musset, de Luigi Pirandello et de Tennessee Williams, pour la poésie de Paul Eluard et de Louis Aragon, pour la prose plus contemporaine, vive et profonde de Delphine de Vigan et de Pierre Lemaitre… Côté littérature noire, je suis subjuguée par le style fort d’auteures telles que Louise Mey et Marie Neuser, par le sens scénaristique de Mathieu Menegaux et Antoine Renand, par le cynisme enragé et foncièrement engagé de Joseph Incardona et Hannelore Cayre. Je papillonne, je m’éveille, je me nourris de chacune de mes lectures. J’ai d’abord lu de la littérature jeunesse pendant la pré-adolescence, puis des classiques, des pièces de théâtre et de la littérature blanche, avant de découvrir la littérature noire avec le polar et le thriller et la littérature classique américaine. Je pense que c’est la combinaison de tous ces parcours croisés qui m’influence… Le fluide de quelqu’un qui créé vient de ce genre de tout, j’en suis intimement persuadée.
 
Peux-tu nous présenter ton premier roman ?
Ils se marièrent et il y eut beaucoup de sang” est un roman policier construit autour de la thématique de l’homophobie, à la croisée du polar, du thriller et du roman noir, peut-être même du roman social.
Pour l’intrigue, elle repose sur plusieurs ressorts. Au début de l’hiver 2017, plusieurs couples d’hommes sont retrouvés morts dans l’Est parisien. Des triangles roses, symbole de la persécution des homosexuels sous le IIIème Reich, ont été déposés sur chaque scène de crime… Le groupe de Maël Néraudeau et Yohann Folembray, officiers à la Section criminelle du SDPJ 94 et couple de jeunes mariés aux vies bien compartimentées, se voit confier l’affaire, mais leur équipe se retrouve rapidement désarmée face à la violence du meurtrier qui va crescendo. L’enquête s’enlise, jusqu’à ce que la tragédie frappe tout près de Maël et Yohann et les entraîne dans une spirale infernale sciemment orchestrée par le Tueur au Triangle Rose tout en les confrontant à leurs parcours personnels respectifs et conjoints…
Ce roman questionne, sous couvert d’une intrigue policière, la responsabilité d’une société inerte face à la violence perpétrée contre ses concitoyens et aborde l’homophobie dans la société française sous plusieurs de ses formes, de la cyber-violence au passage à l’acte criminel en passant par le harcèlement en milieu professionnel. Sa construction et les choix narratifs opérés sont assez différents de ce que l’édition traditionnelle propose dans le polar, et c’était un risque à prendre…
 
Pourquoi t’être lancée dans l’autoédition ?
Au départ, je voulais donner vie à ce roman – qui n’était pas le premier mais le sixième que j’écrivais et achevais, mais le premier auquel je croyais – d’une façon très personnelle. J’avais une idée assez précise de ce que je voulais, de la couverture à la mise en page en passant par le circuit de distribution. Tout est home-made, comme on dit. La photo ne provient pas d’une banque d’images mais a été prise sous mes directives cadrées (l’emmerdeuse, le retour ! 😄 ) par une amie passionnée de photographie et très douée pour ça. Etant une nana très control freak (j’essaie de me soigner autant qu’il se peut…), j’aime tout contrôler de A à Z. J’ai travaillé de longs mois pour parvenir à ce que je voulais, sans compter les trois ans passés sur les manuscrits et les multiples réécritures puisque je n’ai pas hésité à foutre des centaines de pages à la poubelle lorsque je sentais que je n’allais pas où je voulais. Le manuscrit fini ne tombe pas de nulle part, tout a été très réfléchi en amont.
L’auto-édition était pour moi un premier choix et ne découle pas de refus de manuscrits en maison d’édition au préalable. Avec du recul, je crois pouvoir dire que je regrette quand même de ne pas l’avoir soumis au regard de comités éditoriaux… Je n’ai pas eu suffisamment confiance en moi (sans blague…) et en ce manuscrit, ce qui ne veut pas dire que je regrette l’aventure de l’auto-édition, loin de là ! J’ai appris, j’ai pris des claques, j’ai fait des rencontres formidables (et d’autres moins), mon histoire a également rencontré son lectorat, même au-delà des réseaux sociaux ce qui est plutôt rare dans l’auto-édition. J’ai conscience de la chance que j’ai, plus que jamais, et j’en suis infiniment reconnaissante. Je suis comblée autant qu’il se peut sur le plan de l’audience et du succès de ce roman à ma toute petite échelle d’inconnue, seulement mon côté perfectionniste et bosseuse acharnée aurait voulu apprendre et être davantage poussée dans mes retranchements et guidée au moment des corrections. Et ça, seul un travail éditorial avec un professionnel peut l’offrir…
 
Aux lecteurs réfractaires à l’autoédition, que dirais-tu pour les convaincre de te lire ?
Cela peut paraître totalement paradoxal, mais si je veux être honnête jusqu’au bout, je n’irais pas les contredire… Au début de l’aventure, avant d’en explorer les rouages, je l’aurais certainement fait… Et puis j’ai eu l’occasion d’explorer ce monde plus en profondeur et je n’y ai pas découvert que du bon. Sans noircir le tableau non plus, c’est l’arbre qui cache la forêt.
Si je devais opérer une métaphore plus classieuse (ou pas… Pour ça, fallait vraiment pas m’interviewer moi, Aurélie ! 😄) à ce sujet, je comparerais l’auto-édition à un immense jardin botanique en roue libre : très varié, touffu, délicieusement libre et éclectique, infiniment inspirant, il brasse les avantages et les inconvénients de la diversité et de la liberté. C’est-à-dire qu’il est le lit de très jolies fleurs dont certaines sont rares, d’autres qui ne demandent que du temps pour pousser droit et s’en donneront la force, mais tout cela est souvent éclipsé derrière d’imposantes racines narcissiques (pas forcément mauvaises en soi d’ailleurs) qui veulent prendre le dessus sur les autres et s’imposent davantage par la quantité que par la qualité, pour ne pas dire très franchement que l’auto-édition offre son joli petit parterre de trous de cul…
Néanmoins, on ne peut pas ôter ceci à l’auto-édition qu’elle propose souvent des œuvres originales, différentes de ce qu’on a l’habitude de lire lorsqu’on s’en tient aux gondoles des librairies, a son vivier de talents et surtout d’auteurs prêts à bosser dur pour faire de leurs bébés de papier des manuscrits à l’image de leur travail. J’ai moi-même eu l’occasion d’y dénicher quelques pépites que j’ai encore en tête aujourd’hui. Disons seulement qu’un peu d’humilité ne ferait pas de mal à certains…
Certains lecteurs que je sais impartiaux m’ont souvent dit que mon roman donnait l’impression d’avoir fait l’objet d’un travail éditorial tant les corrections y sont chiadées, et ce compliment me met toujours le rouge aux joues d’une midinette. Je ne sais que dire d’autre pour tenter de convaincre un lecteur potentiel : je me vends très mal, tout le monde pourra vous le dire, et je ne me considère de toute façon pas plus exceptionnelle qu’un ou une autre… Il y a d’ailleurs des romans auto-édités que je préfère au mien. L’apprentissage de l’écriture s’opère sur toute une vie, et c’est avant tout lire ses pairs avec humilité, il ne faut pas l’oublier…
Disons que ce n’est pas le pire de tous, voilà. 😂

D’autres projets littéraires sont-ils en préparation ?
La suite de “Ils se marièrent et il y eut beaucoup de sang” est dans les tuyaux depuis un moment.  Le deuxième opus est en cours d’écriture, alors que j’ai déjà la thématique du troisième en tête.
Au moment d’écrire Ils se marièrent…, je suis partie dans l’optique de développer au maximum les personnalités du couple de personnages principaux, Maël et Yohann, pour les exploiter dans une série récurrente avec leur équipe, autour d’enquêtes différentes à chaque fois mais toujours portées par des thématiques de société. Beaucoup de séries de ce genre existent déjà dans le polar français et j’en suis-moi même friande (Thilliez pour le couple, mais aussi Norek, Tackian, Lebel et son incontournable Mehrlicht…), mais aucune n’est portée par des personnages LGBT qui sortent de la caricature habituelle.
D’après les retours qui sont tombés jusqu’ici, les lecteurs se sont beaucoup attachés à Maël et Yohann et ont été très touchés par leur histoire, au moins autant que moi et se sont reconnus dans le réalisme que j’ai voulu leur donner à travers un développement psychologique très contrasté. Et de nombreux lecteurs ont déjà dit vouloir me renouveler leur confiance pour la suite, ce qui me touche au-delà de ce que les mots peuvent exprimer… (ce qui est quand même con, pour un auteur, tu avoueras…)
 
Un petit mot pour la fin ?
On a déjà trop parlé de moi, alors mon petit mot de la fin sera pour toi, Aurélie : puisque je sais à quel point ça te manque, j’ai hâte que tu puisses recommencer à parcourir les salons français autour du noir dans l’après-confinement et t’y souhaite de très très jolies rencontres. ❤️ Et merci…
 
 
Ma très chère Laurine, c’est surtout moi qui te remercie de m’avoir offert une si belle interview, particulièrement riche d’enseignements et absolument passionnante… A ton image tout simplement ! Si, si, j’insiste : Cette jeune femme ne manque décidément pas de talent et mérite immanquablement qu’on se penche sur son premier roman ! Si elle estime ne pas savoir se vendre, faites-moi confiance ! Et si vous souhaitez plus de renseignements, ma chronique se tient prête à vous les offrir et vous attend juste ICI ! Si les salons me manquent un peu, je dois tout de même l’avouer, j’espère un jour avoir le plaisir de t’y rencontrer !
Maintenant chers lecteurs, et en attendant que je vous dévoile une petite surprise demain midi ^^, c’est à vous de vous forger votre propre avis : “Ils se marièrent et il y eut beaucoup de sang” vous attend juste ICI… Bonne lecture mes amis !

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