Julie Ewa ou la définition même de l’ethnopolar aussi prenant que poignant : “Jungle pourpre” de Julie Ewa, paru en avril 2022 aux éditions Albin Michel.
Le pitch : Une gamine livrée comme tant d’autres aux rues de Sumatra. Un ancien membre d’un réseau de trafiquants de drogue reconverti dans la protection de l’enfance. Une enquête de police qui vire à la traque mortelle dans un pays où l’innocence est la plus chère des monnaies. Pourpre est la couleur du sang, et son odeur, puissante, hante ce roman noir.
Après l’avoir découverte puis rencontrée il y a maintenant de nombreuses années sur le petit salon du livre de Montmorillon, je ne suis pas peu fière d’avoir retrouvé Julie Ewa en librairie l’an dernier, et plutôt deux fois qu’une : D’abord avec “Zazaï – Liberté, ma dernière frontière” qui s’avère un récit tout à fait véridique en plus d’être émouvant, puis avec ce nouveau polar, le troisième d’une bibliographie absolument unique. Deux titres que je me suis procurée peu de temps après leur sortie mais dans lesquels j’ai tardé à me plonger… Puis les rendez-vous avec les Louves du Polar dont elle fait partie s’en sont mêlés et c’est ainsi que j’ai embarqué pour Sumatra à travers ces pages d’une fiction criante de réalisme.
Si elle s’est toujours inspirée de son vécu aux quatre coins du monde et aux côtés des populations les plus démunies, Julie Ewa nous livre là sans aucun doute son roman le plus personnel, un bouquin dans lequel l’enquête donne du rythme mais ne tient pas forcément la place essentielle au profit d’un pays, de ses habitants, de sa culture, de ses coutumes, de ses traditions, de ce qu’il peut receler de plus beau mais surtout de plus sombre. Un ethnopolar donc, genre dans lequel Julie Ewa excelle.
Car ce qui constitue immanquablement l’ADN littéraire de cette autrice, c’est l’humain, l’humanité, l’humanitaire, l’humanisme. Et toujours à travers les yeux d’un enfant. Elle fictionne ses expériences, écrit avec son cœur, son âme, ses tripes. En découle une intrigue incroyablement dense et enrichissante, pleine de suspense et plus encore d’émotions. On suit les personnages avec autant d’intérêt que d’attachement, on sillonne les chapitres comme les rues en leur compagnie au gré d’une aventure qui se révèle sidérante et immersive. On découvre ainsi l’envers du décor, celui d’une contrée dont les maux sont multiples, bien loin des cartes postales.
Ainsi Julie Ewa nous dépeint une réalité douloureuse qu’elle connaît, qu’elle a côtoyée, qu’elle retranscrit donc parfaitement de sa plume particulièrement éloquente et juste, de son style sincère et authentique pour une lecture incontestablement sensible.
En bref, Julie Ewa confirme ici sa singularité dans le monde du polar français avec cet ouvrage tout à la fois dur et captivant, instructif et dépaysant. Vrai, tout simplement.