Chroniques 2024 \ Au printemps des monstres de Philippe Jaenada

Comment ne pas être captivé par l’écrivain passé maître dans l’art du “romanquête” : “Au printemps des monstres” de Philippe Jaenada, paru le 18 août 2021 aux éditions Mialet Barrault et désormais disponible en format poche chez Points.

Le pitch : Luc Taron, onze ans, est enlevé à Paris un soir du printemps 1964. Son corps est retrouvé le lendemain dans une forêt de banlieue. Pendant plus d’un mois, un enragé inonde les médias et la police de lettres de revendication signées « L’Étrangleur ». Un jeune infirmier avoue finalement le meurtre et est incarcéré. Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Dans cette société naissante qui deviendra la nôtre, tout est trouble, tout est factice. Tout le monde truque, ment, triche. Et ce qu’on savait se confirme : les pervers, les fous, les monstres ne sont pas souvent ceux qu’on désigne.

A vous, je peux tout confier, mes Bookinautes adorés : Lorsque j’apprends que j’aurai l’honneur et le plaisir d’animer le grand entretien de Philippe Jaenada sur mon dernier salon de l’année à Boulogne Billancourt, je n’ai à mon actif que la lecture sa nouvelle parue l’an dernier aux éditions Pocket dans le recueil “13 à table” au profit des Restos du Cœur. D’aucuns diront que je peux me contenter de bouquiner son dernier roman. Je vous répondrai tout simplement qu’à mes yeux, ce n’est pas suffisant. J’avais donc un mois pour me mesurer à la bibliographie du Sieur Jaenada et, vous me connaissez, mes Bookinautes adorés, impossible n’est pas votre blogueuse déjantée ! Je me suis donc lancée à l’assaut de ces ouvrages en débutant cette folle aventure avec “La Serpe“, Prix Femina 2017 dont la lecture m’a passionnée. C’est donc avec assurance et détermination que je me suis plongée dans ce pavé de plus 700 pages : Même pas peur… Et j’ai très bien fait !

Si l’ouvrage a de quoi impressionner, c’est sans compter le talent de son auteur à nous raconter son récit, à nous le faire vivre comme si nous l’accompagnions au fil de ses investigations. En cela, Philippe Jaenada est moins un romancier qu’un incroyable conteur d’histoire, ce qui le rend d’autant plus fascinant.
C’est donc en sa compagnie qu’on remonte le temps pour découvrir une France pas si glorieuse et revenir sur un drame qui a défrayé la chronique à l’époque. La mort d’un enfant. Un corbeau qui revendique le crime. Un infirmier qui se dénonce avant de revenir sur ses aveux mais passera 41 ans derrière les barreaux après avoir été déclaré coupable de ces faits. Fétichiste de l’archive et enquêteur méticuleux, Philippe Jaenada se livre alors à un travail minutieux pour passer au crible chaque élément, passer en revue chaque protagoniste afin d’apporter un nouvel éclairage à cette affaire qui n’est pas si simple et comporte beaucoup (trop) de zones d’ombre, sans prétendre accuser ou dénoncer pour autant, car là n’est pas son intention : C’est un humaniste, pas un redresseur de torts.
Le dossier est dense, le livre l’est donc aussi mais l’auteur sait alléger le propos au moyen de digressions et anecdotes personnelles dont lui seul a le secret. Si vous pensez lire un auteur en démarrant cette lecture, vous aurez l’impression de quitter un ami en refermant ce livre.

En bref, Philippe Jaenada m’a une nouvelle fois conquise avec son inimitable style à travers cet incroyable “romanquête” plein d’humanité, qu’on lit sans voir le temps passer, au point d’avoir l’impression de l’écouter autour d’un verre, dans un bistrot qu’il aura évidemment choisi… Et on en remande, pardi !

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