
Une envoûtante lecture, emprisonnée dans le givre : “Les Ombres de Willowthorne” d’Estelle Faye, paru le 29 janvier 2025 aux éditions Rageot.
Le pitch : Dans un dix-neuvième siècle où la magie est l’apanage des aristocrates, l’université de Willowthorne est l’une des plus sélectes et des plus secrètes d’Angleterre, lentement envahie par le givre et plongée dans un automne éternel.
Par une nuit de novembre, à Londres, Liam, un bâtard irlandais des bas-fonds, échappe à un guet-apens et découvre qu’il est le fils illégitime du duc d’Harbone. Envoyé à Willowthorne par son père mourant, il devra lutter autant pour s’intégrer là-bas que pour survivre, dans un monde hostile dont il ignore les codes, et où le moindre faux pas peut lui être fatal. Épaulé par Wendy et Jude, ses amies d’enfance avec qui il forme un trio inséparable, il cherchera son chemin parmi les secrets et les fantômes, tout en tombant malgré lui sous le charme de l’intrigant Sohan Crow.
Voilà bien longtemps que je ne m’étais pas autant immergée dans la littérature de l’imaginaire, et plus encore dans la littérature jeunesse. Il m’aura fallu ce programme fort diversifié au salon des Livres dans la Boucle de Besançon pour renouer avec mes premières amours littéraires, d’abord avec Victor Dixen au début de l’été, et puis plus récemment avec Chloé Vollmer-Lo et Estelle Faye afin de préparer la dernière rencontre qui m’a été confiée ces dernières semaines. Ne reculant devant aucun défi, surtout quand il est livresque, c’est avec plaisir et curiosité que votre lectrice aussi déjantée que passionnée s’est donc incrustée à Willowthorne… Où j’ai sûrement laissé un peu de mon cœur et de mon âme…
Sans doute grâce à un grand travail de recherche et de documentation en amont, l’autrice nous fait remonter le temps et nous entraîne au cœur de l’Angleterre victorienne, entre Whitechapel et Willowthorne, où la magie devient “Glamour” (Comprenne qui lira ^^). Si l’intrigue met peut-être un peu (trop ?) de temps à s’installer, c’est au profit d’une ambiance tout à la fois glaçante et grisante, mystérieuse et captivante, qui nous immerge et nous piège sans délai ni répit jusqu’à un dénouement, un tantinet brusque mais absolument émouvant.
Le décor est remarquablement retranscrit, mais plus encore les protagonistes se révèlent finement croqués, dépeints en substance et dotés d’une véritable personnalité. On s’attache immédiatement à Liam et ses deux acolytes, Jude et Wendy, on accompagne le jeune homme à l’Université de Willowthorne où la scolarité promet d’être pénible… On y croise moult personnages, pas tous très sympathiques mais qui servent parfaitement le récit. Mention spéciale pour Sohan (évidemment !) mais aussi pour le Club de spiritisme ainsi que Bronwyn et toute sa maisonnée, autant de gens que j’ai quitté avec beaucoup de regrets. Parce qu’ils nous font vivre cette histoire, ils nous font incontestablement vibrer, passer par moult émotions, ressentir bien des sensations. Parce qu’il n’y a pas que des “Ombres” à Willowthorne, il y a aussi des “monstres” (tristement humains) et des fantômes, des souvenirs et des secrets, des drames et des injustices, des viles manigances et des histoires d’amour. Parce que tout ce petit monde supporte des thématiques fortes et plus actuelles qu’il n’y paraît, et qu’on ne peut rester indifférent à cette lecture. On relèvera par ailleurs cette fabuleuse galerie de portraits féminins qui forcent l’admiration et le respect au fil des chapitres.
J’en terminerai avec la plume de l’autrice, atout majeur de ce roman pour sa beauté. L’écriture est magnifique, très poétique, d’une rare élégance, certains passages sont sublimes et se gravent durablement dans notre esprit. Le style est soigné, empreint de tendresse et sensibilité, pour une véritable ode à la tolérance, à la liberté, au féminisme et à la féminité.
En bref, je suis tombée sous le charme de ce livre, bel ouvrage tant sur le fond que sur la forme… Une seule certitude désormais : J’irai prochainement me pencher sur le reste de la bibliographique d’Estelle Faye !