Chroniques 2025 \ Le Crépuscule de la Veuve blanche de Cyril Carrère

Second opus de la Cellule Sakura et confirmation d’un auteur de talent : “Le Crépuscule de la Veuve blanche“, paru ce 08 octobre 2025 aux éditions Denoël dans la collection Sueurs froides.

Le pitch : Rien ne sert de mourir, il faut savoir disparaître. Un youtubeur suscite l’engouement en remettant en lumière l’histoire de la Veuve blanche, une tueuse en série aujourd’hui disparue qui a terrorisé Tokyo au début des années 2000. Lorsque Junichi Kudo, détective privé dont le destin a été broyé par cette femme apprend que d’autres crimes ont été commis selon le même modus operandi, il décide d’enquêter. Il s’engouffre seul dans le monde des “évaporés”, où la Veuve blanche pourrait avoir trouvé refuge. Bientôt, il disparaît à son tour. Hayato Ishida et Noémie Legrand, de la cellule Sakura, partent sur ses traces. Ils plongent dans les méandres d’un Japon fracturé et mettent au jour un puzzle funeste, où les fantômes d’hier continuent de hanter le présent.

Si je suis les aventures éditoriales de Cyril Carrère depuis sa première parution – C’était alors “Le Glas de l’Innocence“, il y a bientôt dix ans -, “La colère d’Izanagi” fut pour moi une véritable révélation, la (re)découverte de son ADN littéraire et l’expression indubitable de ce qui fait de lui une figure incontournable de la littérature noire. Aussi c’est avec autant d’impatience que d’appréhension que j’attendais “Le Crépuscule de la Veuve blanche“… Parce que le coup de cœur était si grand qu’il lui fallait être à la hauteur pour reproduire chez moi le même engouement… Mais impossible n’est pas Carrère, et le Crépuscule confirme son talent au Pays du Soleil Levant.

Plus qu’un simple roman, Cyril Carrère nous offre une formidable expérience littéraire, une immersion parfaite, pleine et entière, absolument fascinante au cœur d’un Japon authentique à souhait, incroyablement vibrant et vivant, tel que vous ne le connaîtrez jamais autrement qu’en y habitant. C’est là l’incontestable atout de cet auteur qui y vit depuis bien longtemps. En résulte cette densité du décor comme de l’ambiance, cette richesse dans les traditions comme dans les habitudes, cette plongée passionnante au cœur d’un quotidien qui nous rend cet archipel presque palpable, plus vrai que nature.
Un archipel pas si connu qu’on parcourt ainsi en compagnie de Cyril Carrère et ses protagonistes, pour un bouquin conjuguant habilement les codes, entre thriller, polar et roman noir subtilement construit, et plus encore un road book/trip qui nous dévoile les différentes et multiples facettes de ces terres nippones, tout à la fois insaisissables et saisissantes. De Kumamoto à Furano en passant pas Osaka, Kobe et Tokyo, le pays se dévoile autant que ses habitants au gré de thématiques terriblement actuelles et franchement sidérantes, abordées avec un sérieux remarquable au moyen d’un énorme travail d’investigations, mais également avec une puissance romanesque captivante, qui nous tient en haleine de la première ligne à la dernière page tournée.
Si l’intrigue est orchestrée différemment, elle n’en demeure pas moins prenante, palpitante et exaltante, portée par des personnages fort bien croqués et très attachants. On retrouve Hayato Ishida et Noémie Legrand qui nous ont accroché sans délai dans “La Colère d’Izanagi“, on rencontre également le trio de détectives de l’agence Total Life Support qu’on aimerait autant intégrer que la Cellule Sakura (si elles pouvaient même fusionner qu’on adorerait ça !), mais surtout on croise la route d’Alice et Sora, avec lesquelles je préfère vous laisser faire connaissance… Trop vous en dire serait gâcher car elles ont su tournebouler mon capteur d’émotions plus que de raison !
Portée par une écriture toujours plus mature, vive et éloquente, un style efficace, visuel, aussi trépidant que distrayant, l’histoire n’en est que plus belle, touchante et divertissante mais aussi instructive et ahurissante. Cyril Carrère écrit avec ses tripes pour mieux mettre à jour l’âme de son territoire d’adoption, et cela se sent, se ressent. Bienvenue au Japon et dans l’univers des “Evaporés“, un “sous-monde” qui ne se racontera jamais autant à vous qu’à travers ce roman.

En bref, Kitsune me viendra en aide et les yonigeya n’auront bientôt plus de secrets… Quoique : Plongez sans plus attendre dans cet excellent roman !

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