Quand Tomar Khan s’éclipse pour offrir la parole aux femmes : “Celle qui pleurait sous l’eau” de Niko Tackian, paru ce 02 janvier 2020 aux éditions Calmann Levy.
Le pitch : Elle s’appelait Clara. On a retrouvé son corps flottant dans le bassin d’une piscine parisienne. Les circonstances de sa mort laissent à penser qu’il s’agit là d’un suicide. Si Tomar Khan, pris dans ses propres difficultés, envisage de clôturer dès à présent ce dossier, son adjoint Rhonda n’est pas tout à fait de cet avis et pense qu’il y a encore quelque chose à découvrir au delà de ce geste désespéré…
Voilà un an que j’attends ce moment ! Un an… Seulement dans mon enthousiasme et ma naïveté, je me suis persuadée que j’allais retrouver Niko Tackian au salon du Livre de Nemours le 12 janvier… Sans vérifier… Qu’il ne s’y trouvait pas… FRUSTRATION ! Un sentiment qui n’a pas sa place dans mon vocabulaire quand il s’agit de tentation littéraire : Je me suis donc précipitée en librairie pour me procurer l’objet tant convoité en dépit de toute préoccupation financière : Mon auteur et mon libraire avant mon banquier ! Me voilà maintenant parée à bouquiner !
Une fois encore l’auteur réussit son périlleux pari et s’empare d’un sujet déjà maintes fois traité tant il est tristement d’actualité, aujourd’hui plus que jamais, pour nous en livrer une intrigue d’une incroyable singularité, à la fois intense, forte et prenante tout en s’avérant particulièrement sensible, touchante et même bouleversante. Loin de faire dans la polémique ou le voyeurisme, l’auteur aborde la question sous un angle différent, plus délicat et plus subtile : L’aspect psychologique, plus abstrait mais dont les dégâts sont parfois bien plus graves et dangereux qu’il n’y paraît… Parce qu’il n’y a pas que les coups qui laissent des traces… Parce qu’un mot peut causer bien des maux, et ce au plus profond de son âme alors même que la preuve du dommage est tellement plus difficile à apporter. Ainsi l’auteur nous offre ici une intrigue particulièrement bien ficelée, bien menée, mais aussi pleine de ces émotions dont on ne sort pas forcément indemne… Parce qu’elles sont encore trop nombreuses à pleurer sous l’eau…
Véritable pilier de cette formidable trilogie, c’est aussi avec un plaisir réel et sincère que j’ai retrouvé Tomar Khan et son équipe. S’il demeure empêtré dans ses propres difficultés et en proie à ses propres démons, Tomar Khan n’en demeure pas moins présent en coulisse pour soutenir Rhonda dans cet émouvant récit. Emouvant oui, comme je l’ai déjà dit à plusieurs reprises, car les émotions nous gagnent ici bien davantage que dans les opus précédents. Sans doute parce qu’on commence à bien connaître ce commandant auquel on s’est attaché au gré de ses enquêtes, qu’on parvient désormais à cerner sa personnalité et notamment son côté borderline, ses forces et ses faiblesses, et qu’on aimerait bien l’aider si seulement on en avait la possibilité. Peut-être aussi parce qu’on ne peut qu’être ému du sort de Clara, victime à laquelle ce titre rend si joliment et si justement hommage.
J’en terminerai en disant que l’intrigue n’aurait pas tant de prestance, les personnages n’auraient pas tant d’épaisseur sans la plume de notre auteur, si visuelle, si efficace et si soignée, cet inimitable style à la fois vif, élégant et dynamique, le tout rythmé par des chapitres courts qui apportent du nerf au récit, tant et si bien qu’on atteint le point final presque frustré : Parce que la lecture est déjà terminée…
En bref, je dois vous confier un secret : Si jusque-là j’ai toujours eu une légère préférence pour les one-shots du Sieur Tackian, cet opus-là – à la fois prenant et poignant – vient de changer la donne !
Il faut que je découvre cet auteur