Un roman bien plus sombre qu’il n’en a l’air… D’où jaillit pourtant la lumière : “Que Dieu lui pardonne” de Laurent Malot, paru ce 14 janvier aux éditions XO.
Le pitch : A l’aube de sa majorité, Maya vit déjà seule, ayant trouvé refuge à Fécamp, dans un petit appartement dont elle paie le loyer avec des petits boulots pour compléter l’aide financière de sa tante. A 17 ans, Maya va toujours au lycée mais a fui ses parents, ce père qui lui faisait vivre un enfer et cette mère qui préférait fermer les yeux. Trop tôt sortie de l’enfance, cette jeune adulte va croiser la route d’une jeune fratrie : Quatre gamins fort attachants, ses voisins, des victimes également, abandonnés par une junkie à un beau-père violent. Seulement les cloisons sont minces, trop minces pour que Maya les ignore à son tour. Pas elle. Alors qu’elle espérait se reconstruire à l’abri des problèmes jusqu’à l’obtention du Bac, une fuite d’eau va chambouler ses plans et l’existence de Maya va prendre une tournure inattendue. Mais pas seule… Plus maintenant.
C’est toujours avec plaisir et curiosité que je lis un nouveau roman signé Laurent Malot. Parce qu’il varie les genres et les lectures avec une étonnante facilité. Parce qu’il insuffle à ses personnages ce supplément d’âme absolument impossible à oublier.
Ce septième roman ne fait pas exception, et pourtant le défi était de taille. Parce qu’il fallait du courage pour aborder le terrible sujet tristement d’actualité des violences de toute nature que subissent chaque jour les enfants de ce monde. Il fallait de l’audace pour ouvrir les yeux sur ce qu’on ne veut pas voir, pour poser des mots sur l’indicible. Il fallait du cœur et de la pudeur pour en faire cet ouvrage poignant… Et pourtant si beau…
Un court roman porteur d’espoir malgré toute l’horreur du propos parce qu’il est porté, même incarné par une poignée de jeunes protagonistes condamnés au fouet des oreilles bouchées, au bûcher des regards détournés, à la potence de l’indifférence… Mais pas cette fois-ci. Parce qu’on les lit. Parce qu’on les vit. Parce que, même anéantis, ces petits se battent avec l’énergie du désespoir pour avancer dans la vie et accéder au bonheur, fut-il éphémère pourvu qu’il existe.
On pensera peut-être que cette intrigue est trop courte et aurait mérité d’être davantage développée. Peut-être. Toujours est-il qu’elle dit ce qu’il faut sans excès, avec justesse sensibilité, avec émotions et humanité. On pensera peut-être encore que son dénouement paraît trop beau pour être vrai. Peut-être. Et alors ? On a tellement envie d’y croire. Pour eux comme pour les autres. Tous ces autres qu’on croise dans la rue sans même le savoir. “Selon les statistiques, quatre autres élèves, filles ou garçons, ont subi des violences au sein de leur famille ; deux, à caractère sexuel. Je ne sais pas qui ils sont, je sais juste qu’ils sont là. On ne parle pas de ces choses-là, on ne forme pas une communauté, mais il arrive qu’on surprenne des réactions qui laissent penser qu’on traîne le même boulet. On cache nos blessures, on gère comme on peut nos corps en miettes. L’image est parlante. On est des porcelaines brisées, recollées à la va-vite.” (P.123). Plus qu’y croire, on veut que les choses changent véritablement avant qu’il faille mettre en marche la machine judiciaire, parce qu’aucune procédure ne saurait effacer les souffrances endurées.
Alors l’auteur nous entraîne dans cette histoire, courte mais d’autant plus intense qu’elle est livrée à la première personne pour plus d’empathie, qu’elle est servie par une plume fluide et touchante pour mieux nous prendre aux tripes, parce qu’elle est servie par un style simple mais percutant pour mieux nous faire réagir.
En bref, un roman profondément touchant et qu’on espère efficace pour éveiller les consciences.