Un polar atypique et fort intéressant : “La Nuit avalera le Mal” de Marie Compagne, initialement paru aux éditions Ravet Anceau et désormais disponible aux éditions Amanite.
Le pitch : En pleine nuit à Lille, un cambriolage tourne mal et la rue de Condé devient le théâtre d’un effroyable crime. Le lendemain matin la victime est retrouvée atrocement mutilée, baignant dans une mare de sang. Seul témoin du drame retrouvé dans la pièce juste à côté : Théo, neuf ans, un enfant polyhandicapé dont on sait qu’il “ne dira rien”. Mais si le jeune garçon s’avère effectivement privé de parole, son orthophoniste Emma Lordon connaît une technique qui, bien que controversée, lui permet de communiquer… Et donc d’exprimer ce qu’il a vu et entendu… Autant d’éléments dont ne se privera pas le Capitaine Sybille Lievic pour relancer cette enquête particulièrement délicate…
C’est dans le cadre des sélections pour le Prix des Auteurs Inconnus que j’ai croisé la plume de Marie Compagne, qui concourait alors avec “La Mémoire dans le Sang” son second polar paru aux éditions Amanite. Un livre fascinant dans lequel j’ai pris grand plaisir à me plonger alors qu’il se trouvait parmi les finalistes de la catégorie “Littérature noire”, mais qui m’avait toutefois laissée un tantinet frustrée de n’avoir pas fait plus ample connaissance avec ses personnages au préalable pour mieux les appréhender au fil des pages. Je m’étais alors promis de remonter le temps et la bibliographie de Marie Compagne, une promesse que je viens enfin d’honorer : Mieux vaut tard que jamais !
Si ce titre s’avère très différent de son cadet, il n’en demeure pas moins original et captivant à souhait ! Tandis que “La Mémoire dans le Sang” relevait aussi du roman gothique selon moi, l’autrice nous livre ici un authentique polar régional qui nous entraîne au cœur de la Capitale des Flandres pour une intrigue pleine de suspense, fort bien construite et rondement menée. Même si de rares éléments peuvent laisser un tantinet dubitatif, le récit nous tient en haleine de la première ligne jusqu’à la dernière page tournée, tant l’histoire se fait prenante, mais aussi enrichissante en abordant des thématiques aussi difficiles qu’intéressantes avec profondeur et respect. Il sera donc question de handicap et d’expression, de psychophanie et de communication facilitée, autant de sujets remarquables que l’autrice développe avec beaucoup de pertinence.
Mais si ce roman policier est aussi efficace, c’est aussi parce qu’il est soutenu par une petite galerie de personnages construits en substance, dotés d’un véritable tempérament. Chacun tient sa place et a son rôle à jouer mais on s’attachera plus particulièrement à notre Capitaine Sybille Lievic, l’orthophoniste Emma Lordon et son avocate Eva Lestat. Trois destins cabossés par la vie, abîmés par le passé, trois femmes avec leurs failles, leurs blessures, leur caractère et leur personnalité qui retiennent toute notre attention, que je suis enchantée d’avoir retrouvées dans cet opus et que je comprends mieux désormais.
Ce livre est d’autant plus agréable à lire qu’il est servi par une plume fluide, élégante et soignée, un style aussi attrayant qu’efficace pour une lecture plaisante et aisée.
En bref, un polar en Nord aussi sombre et palpitant qu’intéressant… Et une autrice que je suis vraiment ravie d’avoir pu découvrir !