Livres et vous ? Livrez-vous… Avec Charles Aubert !

Comment mieux commencer l’année qu’en compagnie d’un auteur dont le dernier roman fut l’un de mes plus gros coups de cœur 2022 ? Si vous n’avez pas encore lu “Tala Yuna“, ce roman de Charles Aubert est une véritable merveille et cet auteur de grand talent a eu l’extrême gentillesse de m’accorder cette petite interview pour me permettre de vous le faire découvrir ainsi que son univers : Bonne lecture à tous ! 

Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Marié à une femme extraordinaire – une véritable magicienne de la vie. Deux enfants, aventuriers dans l’âme, bourrés d’humour, que j’admire profondément.
Quant à moi ? 56 ans, un homme cramponné à son dernier rêve : l’écriture.

Petit ou grand lecteur : Quelle place tient la lecture dans ta vie ?
Lecteur compulsif. J’aurai passé toute ma vie avec un livre glissé dans la poche de mon blouson, persuadé qu’il agirait comme une sorte de bouclier pour me protéger de la « connerie humaine ». Avec le recul des années, je peux dire que, malheureusement, ça ne marche presque jamais.

Quel a été ton premier coup de cœur littéraire ? Et le dernier ?
Le livre qui m’a mis le pied à l’étrier. J’avais 12 ans. Ma prof de français nous a donné à lire « La petite fille au bout du chemin » de Laird Koenig. J’ai découvert que la littérature pouvait me concerner et m’aider à comprendre le monde qui m’entourait.
Mon dernier coup de cœur littéraire : « Jimmy Bluefeather » de Kim Heacox.

Y a-t-il un livre/auteur qui t’a poussé à prendre la plume ? Quel a été ton déclic ?
Il n’y en a pas un en particulier. Mais la somme de plusieurs. Je nommerais donc Philippe Djian, Jack Kerouac, Jim Harrison, Pierre Drieu la Rochelle, Jean-Claude Izzo, Jack London, Herman Melville, Patrice de la Tour du Pin, Walt Whitman
Pour ce qui concerne le déclic, mon épouse et moi avons élevé nos enfants en leur enseignant – entre autres choses – qu’il était important de s’efforcer de faire vivre ses rêves et de mener ses actions à fond et jusqu’au bout. Quand ils ont été plus grands, j’ai bien été obligé de mettre mes actes en cohérence avec mes paroles. Mon plus grand rêve étant, de tout temps, l’écriture, un jour, je me suis donc assis derrière un bureau et, sous leurs regards attentifs, me suis retroussé les manches.

Après une trilogie qui se classe indubitablement en littérature noire malgré sa douceur et ses couleurs, tu as fait ton retour en librairie l’an dernier avec « Tala Yuna », un roman aussi passionnant qu’immersif, empreint de poésie et de spiritualité, dans lequel la nature tient une place prépondérante pour en devenir presque un personnage à part entière puisque la météo, ou plus précisément le vent, en donne le tempo. Comment une telle intrigue s’est-elle invitée dans ton imaginaire ?
C’est un roman que je portais en moi depuis longtemps. La nature a une place importante dans ma vie. Dans mes précédents romans, elle était déjà très présente. Dans « Tala Yuna », je voulais qu’elle soit un personnage à part entière de l’histoire. Ainsi, le chapitrage du roman reprend l’échelle de Beaufort qui mesure l’intensité de la mer. Le destin des personnages sera intimement lié à l’évolution de cette nature. Nous sommes constitués de 65% d’eau. La tempête, qui s’annonce dès les premières phrases de « Tala Yuna », risque de se transformer, pour certains, en tempête intérieure.

Un roman plus difficile à classer, oscillant merveilleusement entre le roman noir, le nature writing et le roman d’aventures, dont les repères spatio-temporels se brouillent tandis que le vent se lève… Était-ce voulu ? Conscient ? Peux-tu nous expliquer comment et pourquoi ?
Oui, après la trilogie des couleurs – comme la nomme mon éditeur – qui se déroulait dans des endroits très précis – les lagunes occitanes, je voulais un récit qui ne puisse pas être localisé avec certitude, ni dans le temps, ni dans l’espace. L’intérêt était de permettre au lecteur de faire une partie du boulot. Ainsi certains ont pensé que l’action se déroulait en Alaska, d’autres m’ont parlé de la Norvège ou de la Terre de Feu. C’est, selon moi, la grande force de la littérature : laisser la part belle au lecteur en le laissant activer librement son imagination.

Un roman sans doute plus personnel aussi, pour lequel tu as donné congés à Niels Hogan et ses acolytes : Quelle part de toi y a-t-il dans ce roman ? Que deviennent donc tes premiers compagnons de papier durant cette pause (bien méritée) ?
Dans chaque roman, un écrivain laisse forcément une part de lui. Je pense qu’il y a des thèmes qui sont récurrents d’un livre à l’autre. Pour ma part, c’est certainement la place de l’homme dans la société et dans la nature, le rapport à la différence, la dérision, l’humour. Je crois aussi que je suis toujours très admiratif de la force et de la puissance des femmes. C’est un peu « tarte à la crème » de dire qu’elles portent le monde. Mais je le crois profondément. Elles donnent la vie et, souvent aussi, son sens à la vie.
Au sujet des personnages de ma trilogie, ils sont pour le moment en pause, au bord d’une lagune. J’espère qu’ils vont bien. Parfois, quand je suis sur mon kayak, alors que le jour se lève, j’aperçois une ombre sur la rive, j’entends un bruit dans les roseaux. Je me dis que ce ne peut être que l’un d’entre eux. Alors je fais un signe de la main dans sa direction.

Quels sont tes projets littéraires à venir ?
J’ai un roman qui devrait être publié dans le courant de l’année. C’est une histoire qui me tient énormément à cœur. J’ai à la fois hâte et aussi un peu peur, car il s’agit de littérature blanche : une biographie très légèrement romancée d’un homme qui mériterait, selon moi, d’être mis à la lumière. Peut-être que certains de mes lecteurs seront déstabilisés. J’ai conscience de prendre un risque. Mais je n’ai pas le choix. Ce livre m’a été littéralement soufflé à l’oreille. Son écriture a été une aventure extraordinaire – presque mystique – et, à ce jour, je n’en suis toujours pas entièrement remis.

Question pêle-mêle : Quel est…
Ton livre de chevet ? « Le livre de l’intranquillité » de Fernando Pessoa
Le livre qui cale ta bibliothèque ? « À la recherche du temps perdu » de Marcel Proust
Le livre que tu aurais rêvé d’écrire ? « Le petit prince » d’Antoine de Saint-Exupéry
Ta lecture en cours ? « Balades au paradis » de Sam Shepard

Si tu devais comparer ta vie à un roman, lequel serait-ce ?
« American psycho » de Bret Easton Ellis… Non, je déconne ! J’aimerais plutôt que ce soit « L’homme qui plantait des arbres » de Jean Giono mais, en réalité, je crains que ce soit plutôt « Don Quichotte » de Cervantès ou « Bouvard et Pécuchet » de Gustave Flaubert

Un petit mot pour la fin ?
Arghhh !!! (Je voudrais aussi que ce soit mon épitaphe).

Un immense merci à Charles Aubert de s’être ainsi prêté au jeu de mes petites questions indiscrètes ! A présent, et si ce n’est pas encore fait, je vous invite à découvrir sans tarder la bibliographie de ce formidable auteurs : Quatre romans et autant de belles aventures vous y attendent !

Laisser un commentaire