Un polar érudit, aussi prenant qu’enrichissant, aussi efficace qu’effrayant : “Promets-moi d’avoir peur” de Frédéric Lepage, paru en mars 2023 aux éditions Robert Laffont.
Le pitch : Soudain, Luna se demande qui est cette femme qui évalue, analyse, calcule… plutôt que de laisser la panique s’emparer d’elle et mourir de frousse ! Elle devrait hurler, blêmir, voir défiler sur sa rétine le film accéléré de sa vie. Au lieu de quoi elle n’est en proie ni à la peur ni à l’angoisse. Luna se sent déconnectée, séparée du reste de l’humanité – il lui semble qu’une partie de son cerveau n’assure plus l’une de ses fonctions fondamentales, faisant d’elle un monstre froid, indifférent à son propre destin.
La rarissime maladie d’Urbach-Wiethe provoque chez le sujet l’abolition du sentiment de peur. De quoi couler des jours paisibles… ou se mettre en danger de mort.
Dans un appartement de Chinatown, à New York, une jeune femme est victime de ce syndrome. Elle s’appelle Luna Ritter. Et elle va disparaître. Pourquoi ?
C’est amusant comme les choses se répètent parfois… Je me souviens du hasard qui m’avait permis de découvrir le précédent roman de Frédéric Lepage à l’occasion d’un ApéroPolar des éditions Pocket. J’avais alors tardé à vous en parler jusqu’au Polartifice dont il était le Parrain l’an dernier… Paru en mars 2023, je me suis procuré le nouveau roman de Frédéric Lepage un peu plus tard, lors du Festival du Livre de Paris, mais n’ai réussi à le lire qu’en ce début d’été… A la veille du Polartifice à l’occasion duquel j’aurai plaisir à la retrouver !
Une fois encore l’auteur s’empare des codes du polar pour mieux sortir des sentiers battus en nous proposant un roman original et bien ficelé mais surtout très intelligent, aux dimensions scientifiques aussi captivantes qu’effarantes.
N’oubliant pas de faire un petit clin d’œil à ses précédents personnages, l’auteur nous ramène donc au cœur d’une Ville qui ne dort jamais si bien retranscrite qu’on s’y croirait pour y rencontrer d’autres enquêteurs, aussi dissemblables que complémentaires. Mais plus encore il nous présente Luna Ritter, jeune vétérinaire atteinte d’un syndrome que je vous laisse découvrir, disparue sur laquelle ils investiguent. Alternant dès lors les temporalités, l’enquête laisse finalement la priorité au portrait de cette jeune femme pour mieux nous pousser à la réflexion sur des questions plus actuelles et inquiétantes que jamais au gré d’une intrigue plus complexe qu’il n’y paraît.
Si l’auteur pose d’abord les bases de son récit, c’est pour mieux en accentuer le rythme au fil des pages jusqu’à un dénouement aussi inattendu que réussi. Porté par une plume particulièrement riche et soignée, un style soutenu d’une précision redoutable, l’intrigue n’en est que plus prenante et sidérante sur ce qu’elle “implique”.
En bref, je suis ravie de m’être enfin plongée dans cette lecture exigeante et forte d’un indéniable travail de recherche. Il me tarde à présent de découvrir un précédent titre de l’auteur que j’ai découvert (encore) par hasard à Sens… En attendant le prochain !
Madame, jai lu l’ouvrage de Frédéric Lepage, d’un trait. J’ai l’immense privilège de connaître bien cet homme, délicat s’il en est, aux connaissances immenses et très éclectiques. En cheminant au fil de votre commentaire, je ressens tout à fait la pertinence de votre proposition quant à l’ensemble du travail de Frédéric Lepage, pour ce qui concerne ce “tableau”. Votre commentaire me rappelle, tout à fait le voyage que la lecture de cet ouvrage a produit en moi. Sans ne rien confier d’exceptionnel, je suis un thérapeute passionné et la “chance” m’a été offerte de vivre ce que l’on nomme une “mort imminente “. Je suis revenu avec un avant et un après et une expérience à nulle autre pareille.
Frédéric, en nous tenant la main, à mon entendement, c’est tout cela qu’il évoque. Comment, sans ne rien en dire, l’avez-vous découvert.
Félicitations pour votre sensibilité.