Chroniques 2024 \ Au nord de la frontière de R.J. Ellory

Un conteur hors pair, au sommet de son art : “Au nord de la frontière” de R.J. Ellory, paru en mars 2024 aux éditions Sonatine.

Le pitch : Victor Landis est shérif dans une petite ville de Géorgie. C’est un homme solitaire, qui a voué son existence au travail. Pour toute famille, il ne lui reste que son frère, Frank, avec qui il a partagé une enfance misérable avant qu’une brouille ne les sépare. Lorsque Frank est retrouvé mort dans des circonstances étranges, Victor décide de se rendre dans le comté de Dade, près de la frontière avec le Tennessee, afin d’en savoir plus. Là, il découvre que son frère avait une ex-femme, et une fille, dont il ignorait l’existence. Pour sa nièce, Victor doit tenter d’en savoir plus sur la mort de Frank. Le voilà immergé au coeur des communautés isolées des Appalaches, où la drogue, les trafics en tout genre et la corruption sont omniprésents. Bientôt, sa piste le conduit à une série de meurtres inexpliqués de jeunes adolescentes…
Prenant pour cadre les Appalaches, région la plus pauvre des États-Unis, personnage à part entière du récit, l’auteur de “Seul le silence” et “Une saison pour les ombres” entraîne le lecteur dans un voyage aussi palpitant qu’inoubliable.

Si ce roman est paru en mars dernier, je ne me le suis procurée que trois mois après, quand j’ai enfin croisé son auteur à l’occasion d’un salon, et ce à l’autre bout de la France, précisément à Encausse les Thermes, au fin fond de la Haute Garonne… J’espérais parvenir à le lire avant de retrouver R.J. Ellory en Corse – Oui, en Corse, à Porticcio très exactement ! – mais le temps m’a manqué… Qu’à cela ne tienne, j’ai profité du mois de juillet pour partir “Au nord de la frontière“, un voyage d’une noirceur insoupçonnable, aux sentiments extrêmes…

En effet, R.J. Ellory connaît tous les secrets de la littérature noire et en maîtrise indéniablement toutes les ficelles, comme en témoigne ce nouveau titre, entre polar palpitant et roman noir exceptionnel. Sans s’appesantir ni se presser, l’auteur prend le temps de présenter son décor comme un personnage à part entière, installe une ambiance qui se fait de plus en plus sinistre et oppressante, ménage son suspense comme jamais et nous tient en haleine comme personne.
L’intrigue pourrait paraître classique… Mais elle ne l’est pas tant. Déjà parce qu’elle se veut double, bien plus complexe qu’il n’y paraît… Et tellement plus profonde qu’on ne peut l’imaginer. Parce qu’elle ne serait pas aussi passionnante sans des protagonistes d’une étonnante crédibilité, d’une authentique humanité, au premier rang desquels Victor Landis, shérif de Géorgie, grand solitaire brouillé avec son frère, lui-même shérif dans le Tennessee, qu’il ne revoit que pour identifier son cadavre, dans un état que je vous laisse découvrir. Il lui apprend une ex-femme ainsi qu’une fille, donc sa nièce… Et beaucoup, beaucoup d’émotions et d’empathie au fil du récit. Autant d’éléments qui ne sauraient exister et nous submerger si l’auteur n’avait pas travaillé la psychologie de ses personnages avec minutie, si l’auteur n’avait pas su les étoffer, les croquer avec substance et force détails.
Ainsi l’auteur nous offre une histoire aux fortes thématiques – parmi lesquelles, la famille, qu’il explore sous tous les angles -, et dont il gère les moindres détails : des personnages à la trame narrative en passant par les dialogues et les révélations, le tout servi par une plume toujours aussi fluide, agréable et sensible, un style empreint de justesse et de finesse pour un moment de lecture prenant et captivant à souhait.

En bref, avec la famille comme thème central, R.J. Ellory conjugue noirceur et émotions, suspense et empathie pour nous offrir une intrigue remarquable, aussi sombre que fascinante.

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