Le polar français a de l’avenir avec un tel talent dans ses rangées : “Les oubliés de Dieu” de Ludovic Lancien, paru en novembre 2020 aux éditions Hugo Poche.
Le pitch : Tourmenté par un drame personnel, le Capitaine Darui doit pourtant rejoindre son équipe, appelée sur une scène de crime particulièrement sordide. Le corps atrocement mutilé du Docteur Richard Mievel vient en effet d’être retrouvé au sein même de son cabinet. Mais sous couvert d’une réputation irréprochable doublée d’une discrétion sans faille, le médecin généraliste nourrissait un intérêt particulièrement malsain pour ce qu’on appelle la tératologie, révélant un aspect bien plus sinistre de sa personnalité. Alors que Gabriel est à son tour rattrapé par les fantômes de son propre passé, toute l’équipe du Commandant Eric Blasco dit “Le Bélier” se lance corps et âme dans cette sombre enquête en explorant toutes les pistes… Et les cadavres qui vont avec…
Déjà peu satisfaite de la qualité de mes chroniques ces temps-ci, je ne cesse plus de me morigéner : Comment ai-je pu mettre aussi longtemps à vous parler de cet auteur fabuleux ?! COMMENT ?! Non mais je vous le demande ! J’ai pourtant croisé la plume de Ludovic Lancien début 2020, alors que je devais le rencontrer pour l’une des animations organisées autour du formidable salon Noir Charbon… Si celle-ci a évidemment été annulée, s’ajoutant aux nombreux événements culturels sacrifiés sur l’autel de la redoutable Covid 19, il n’en demeure pas moins que j’avais découvert et adoré “Le Singe d’Harlow“, un excellent premier roman dont la lecture m’avait absolument bluffée ! Seulement les choses se sont compliquées, le confinement s’est annoncé, la crise sanitaire a démarré, la vie s’est à la fois arrêtée puis emballée… J’ai oublié…!
Et puis j’ai ENFIN rencontré Ludovic Lancien en décembre dernier, à l’occasion du fameux Salon Noir Charbon, oui le même, mais pour son édition 2021 ! Si le petit boulet que je suis a évidemment oublié son bouquin à la maison, je n’ai pas manqué de me faire dédicacer un exemplaire du suivant qui m’avait à son tour échappé : Il était grand temps de se rattraper !
Depuis j’ai bouquiné ce second roman et organisé mon premier BiblioLive de l’année… Depuis j’ai invité Ludovic Lancien pour une table ronde avec Nicolas Nutten et je me dois de chroniquer cet excellent titre… Depuis je galère tant mes mots ne parviennent pas à traduire le coup de cœur que j’ai eu pour cette lecture !
Plus qu’un simple polar, l’auteur nous propose ici une intrigue tout à la fois ambitieuse et audacieuse, intelligente et palpitante, enrichissante et captivante… Un défi de taille pour un second roman… Mais impossible n’est pas Lancien, et c’est un défi qu’il relève haut la plume, je puis vous l’assurer ! Ainsi l’auteur nous happe dès les premières pages avec un prologue énigmatique pour ensuite nous entraîner sur une scène de crime qui annonce la couleur, donne le ton et marque les esprits : C’est de la littérature noire qui nous attend là, ou je ne m’y connais pas ! Et c’est ainsi qu’on se laisse bien volontiers entraîner à travers cette enquête pleine de rebondissements incroyablement prenante et redoutablement maîtrisée, mais aussi fort bien documentée en abordant des thèmes particulièrement intéressants tels que la tératologie ou le tourisme noir – autant de sujets que je vous laisse découvrir : Trop vous en dire serait gâcher, parole de lectrice passionnée !
Mais si l’intrigue est si fascinante, c’est aussi parce qu’elle est menée de main de maître par une poignée de personnages fort bien croqués et profondément ancrés dans la réalité, dotés d’un vrai supplément d’âme leur apportant cette humanité qui nous les rend si attachants, si plaisants à côtoyer. Sans oublier son précédent personnage principal laissé à Brest le temps d’un (premier) roman, l’auteur nous présente les anciens acolytes de Lucas Dorinel, une brillante équipe aux côtés de laquelle on s’apprête à investiguer, que l’on prend plaisir à intégrer pour vivre plus que lire cette enquête bien plus ardue et éprouvante qu’il n’y paraît !
Soumis à un suspense de tous les instants et tenu en haleine d’un bout à l’autre du récit, ce dernier est en outre servi par une plume particulière fluide et élégante, visuelle et attrayante, un style dynamique et efficace pour en devenir addictif… Tant et si bien qu’on ne peut finalement plus lâcher ce livre sitôt qu’on l’a commencé !
En bref, un polar d’une étonnante densité et d’une grande noirceur, aussi brillant que palpitant : Une vraie réussite et un auteur que j’entends suivre avec beaucoup d’intérêt… Oui Ludovic : Tu es dans mon viseur littéraire désormais !