Un roman historique particulièrement saisissant : “Orphelins 88” de Sarah Cohen-Scali, paru le 20 septembre 2018 aux éditions Robert Laffont – Collection R.
Le pitch : Juillet 1945… Parmi les décombres, les Alliés découvrent un garçon, visiblement mal en point et désorienté… Il ne sait pas qui il est, a oublié jusqu’à son propre nom, son identité… Alors ils le baptisent Josh et le conduisent en sécurité, dans un orphelinat où il sera entouré pour recouvrer la santé comme son passé… Seulement la reconstruction n’est pas une chose facile quand on a connu l’inhumanité…
De cette auteure je ne connaissais même pas le nom… Si on ajoute à cela le fait que la Seconde Guerre mondiale n’est pas ma période de prédilection, vous vous demandez comment nos routes ont donc bien pu se croiser à l’occasion de cette rentrée… Aussi me faut-il vous l’avouer : C’est en premier lieu par la couverture et son titre que mon attention fut attirée, pour ne plus la lâcher jusqu’à sa sortie en librairie… Les jeux étaient fait, les dés jetés… Dans cette lecture il me fallait donc me lancer…
Force est de constater que j’ai décidément bien fait ! Fort d’un remarquable travail de recherche, l’auteure nous dévoile ici un pan plutôt sordide et méconnu de l’époque déjà bien sombre de l’Allemagne nazie, en abordant le sujet du Lebensborn, programme eugéniste initié par Himmler dont l’objectif était de créer et développer une race aryenne pure et dominante, dont les premières générations sont essentiellement constituées d’enfants kidnappés en Europe de l’Est : Les Nazis ne manquaient alors pas d’imagination en termes d’horreurs et d’abomination…
L’intrigue de ce roman démarre donc à l’issue de la Guerre… L’Europe est libérée mais pas encore en paix… Oui l’Europe est libérée mais pas encore guérie… Ses enfants aussi doivent panser leurs plaies… Et les plaies les plus profondes ne sont pas forcément physiques…
Alors on rencontre Josh, qui n’en sait pas plus que nous à son sujet… Traumatisé et introverti, mutique et hermétique, faire connaissance avec lui n’est pas chose aisée… Mais nous tenons bon, et lui aussi, on l’accompagne à la recherche de ses souvenirs volés et envolés… Et tandis qu’on découvre peu à peu tout ce qu’il a pu subir, on s’attache foncièrement, profondément à lui… Navrés que nous sommes de voir des hommes être aussi inhumains envers leurs semblables à une époque pas si lointaine qu’on voudrait le penser…
Le sujet est terrible, mais le livre très instructif… Certains chapitres sont rudes mais finalement nécessaires et tristement réalistes… Et tandis qu’il assemble peu à peu les pièces de son puzzle de vie pour découvrir ses origines au gré de ses rencontres, le lecteur se voit quant à lui assailli pour tout un tourbillon d’émotions et autres sentiments, tant les sujets abordés sont forts et éprouvants.
La plume est particulièrement belle et fluide, en contraste avec les atrocités qu’elle décrit… Il s’agit là d’un roman bien sombre de par les thématiques abordés… Et pourtant agrémenté de quelques touches d’humour pour alléger le propos, mais aussi rempli d’humanité et d’espoir malgré toute la noirceur de l’intrigue…
En bref, un roman poignant dont on ne ressort pas indemne, qui devrait être mis entre toutes les mains pour dévoiler les horreurs de la Guerre… Toutes les horreurs dont les hommes sont capables…