Chroniques 2022 \ Il faut beaucoup aimer les gens de Solène Bakowski

“Frappe-toi le cœur, c’est là qu’est le génie”… Et ça, Solène l’a bien compris : “Il faut beaucoup aimer les gens” de Solène Bakowski, paru en mai dernier aux éditions Plon.

Le pitch : A 31 ans, Eddy Alune est un jeune homme discret et solitaire pour ne pas dire misanthrope… Veilleur de nuit depuis qu’il est sorti de prison, la seule compagnie qu’il apprécie est la voix de Luciole, animatrice nocturne à la radio, qu’il écoute avant d’autant plus d’amitié et de nécessité qu’il surmonte difficilement le décès de son père… Un mort qui en rappelle une autre, une anonyme inhumée comme telle, qu’il a découverte un matin dans la rue alors qu’il se rendait en cours, vingt ans plus tôt… Une défunte à qui il avait subtilisé quelques effets personnels qu’il retrouve en déménageant l’appartement paternel. C’est avec ce peu d’éléments et muni de son magnétophone qu’il se met alors à la recherche de toutes les personnes ayant pu côtoyer cette inconnue, afin de les écouter pour lui rendre son identité, son passé, son histoire, sa mémoire…

Si j’ai toujours apprécié la plume de ma très chère Solène Bakowski, sa lecture me fait immanquablement briller les yeux, vibrer l’âme et palpiter le cœur depuis son précédent roman joliment intitulé “Rue du Rendez-vous“… Et c’est un nouveau rendez-vous que nous propose aujourd’hui Solène, en compagnie de nouveaux personnages mais toujours avec la même bienveillance, la même passion… Et c’est aussi beau et lumineux qu’une étoile filante dans la nuit…

A travers une intrigue tout à la fois prenante et émouvante, l’autrice nous dresse le portrait d’une inconnue pour mettre en lumière ceux qui le sont tout autant, tous ces laissés pour compte auxquels on n’accorde pas même un regard, ces abandonnés à leur triste sort jusqu’à rendre leur dernier souffle dans l’indifférence la plus totale sans que quiconque ne se souvienne même de leur nom… Une effroyable réalité à laquelle Solène nous confronte avec ce roman incroyablement authentique et sensible, simple et tellement touchant.
Et c’est sans doute là le secret de Solène Bakowski : insuffler à ses personnages une véritable profondeur, un vrai supplément d’âme, leur offrir authenticité, sincérité et humanité pour les rendre d’autant plus crédibles et bouleversants. C’est donc avec plaisir, envie et intérêt que j’ai retrouvé Solène, accompagné Eddy et rencontré leur anonyme, qu’on reconstruit ensemble son existence au fil des pages, qu’on se laisse bercer par l’émission de Luciole tandis qu’on voit Eddy se réparer, se métamorphoser au gré des souvenirs et au contact des autres tandis que cette (en)quête avance…
Portée par une trame narrative judicieuse mais aussi généreuse tant elle fait la part belle aux émotions, l’histoire est aussi servie par une plume incroyablement fluide et délicate, un style empreint de pudeur et de tendresse ainsi qu’une certaine nostalgie pour une lecture d’une douceur extrême dont je suis sortie profondément émue.

En bref, plus qu’un roman saisissant, Solène Bakowski nous offre ici une ode aux rencontres et aux souvenirs, un requiem pour la vie et les personnes ordinaires qui la composent… Et c’est juste magnifique…

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