Mes petits Bookinautes adorés : Alors que l’année touche à sa fin, il me fallait absolument vous reparler de ma série coup de cœur de l’année ! Après l’avoir évoquée à travers un live puis deux chroniques, j’ai donc sollicité son auteur, le talentueux Stanislas Petrosky, et c’est avec un immense plaisir que je l’ai vu accepter cette petite interview pour vous parler de “Surin d’Apache” dont les deux premiers tomes – “L’affaire de l’île Barbe” et “L’affaire Echallier” – vous attendent déjà en librairie. Je le remercie vivement d’avoir pris le temps de répondre à mes petites questions indiscrètes et vous laisse à présent découvrir ses réponses : Belle découverte et bonne lecture !
Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Stanislas Petrosky, de l’autre côté de la rive des cinquante ans. Pendant plus de trente ans j’ai travaillé dans le domaine de la mort, la thanatopraxie plus précisément, à l’heure actuelle je l’enseigne encore au sein d’AFITT, une école, qui est aussi ma maison d’édition. Et cela fait huit ans que j’écris…
Y a-t-il un livre/auteur qui t’a poussé à prendre la plume ? Quel a été ton déclic ?
Si je ne dois en retenir qu’un, c’est celui qui m’a donné goût à la lecture, Frédéric Dard. J’ai commencé par la série des San-Antonio, puis, rapidement, je me suis intéressé à ses autres romans. « Une seconde de toute beauté » fut une vraie claque. L’homme me fascine, comment d’un côté créer un personnage tel Alexandre-Benoit Bérurier et d’un autre Héléna… Quant au déclic, c’est ma marraine en écriture, Nadine Monfils, je lui ai fait lire un texte, elle m’a dit « lance-toi », je l’ai écoutée…
Si la vie du Professeur Lacassagne est sans aucun doute digne d’un roman, qu’est-ce qui t’a pris de prendre cette phrase au mot en l’entraînant sous ta plume au gré d’une passionnante série ? Que ressent-on lorsqu’on redonne vie à cet illustre personnage ?
En fait, je voulais faire une pause dans la série des Requiem, je voulais revenir à l’Histoire à laquelle j’avais déjà touché avec « Ils étaient vingt et cent » et j’hésitais sur le sujet, c’est Nicolas Delestre, un ami, qui est le directeur d’Afitt, qui m’a donné l’idée de cette série, “Surin d’Apache“.
Et que ressent-on ? Un immense plaisir ! Lacassagne est un ponte de la médecine légale moderne, un précurseur de la police scientifique – il a découvert énormément de choses – mais il est presque inconnu du grand public. De plus, plus je fouille dans les archives, plus je trouve le personnage fascinant…
Une série de livres où tout ou presque est rigoureusement vrai, jusqu’aux déclarations des protagonistes, retranscrites à partir de rapports ou autres documents tout à fait exacts : Pourquoi avoir fait preuve d’une telle minutie et comment y parvient-on ?
Je m’imprègne des rapports, des publications de Lacassagne, cela me permet de comprendre comment il parlait, réagissait, ce qui me permet d’être au plus près de la réalité historique. Pourquoi ? Simplement parce que c’est une personne qui a existé, je ne pourrais raconter sa vie en mentant sur lui. Certes, il n’a pas connu Ange-Clément, puisque personnage fictif, cependant, s’il avait croisé un homme de cet acabit, il aurait pu tenter cette expérience de le remettre dans le droit chemin, et ainsi de mettre en exergue sa théorie du bouillon criminel.
Après « l’affaire de l’île Barbe », nous voici donc concentrés sur « l’affaire Echallier » : Pourquoi cette affaire plus qu’une autre ? Comment choisis-tu tes « dossiers » et de quelle façon les travailles-tu ?
Le premier choix est chronologique, pour l’avancée de l’Histoire de la médecine légale, l’évolution des relations entre les personnages. Ensuite, des affaires, il y en a des masses, alors je les lis, et quand je vois que, dans cette enquête, il y a eu une découverte, une innovation, je la prends. Ensuite, je décortique tout : interrogatoires, presse, rapports d’expertises, procès-verbaux, je reconstitue la genèse de l’homicide. Ensuite, une fois que j’ai cette matière première, je viens mêler l’époque – politique, invention, découverte, anecdotes, etc. – et là, arrive alors le côté fictif, les aventures d’Ange-Clément, puis je malaxe le tout en le travaillant et le retravaillant très longtemps.
Seul personnage fictif de cette aventure, Ange-Clément Huin se dévoile bien davantage à travers ce nouvel opus : Comment celui-ci s’est-il invité dans ton imaginaire et pourquoi le faire ainsi évoluer ?
J’aime beaucoup écrire à la première personne, le récit immersif. Dans quasiment tous mes ouvrages, je suis le narrateur, c’est mon côté schizophrène, mais je ne me voyais pas être Lacassagne. Si j’étais lui, je ne pouvais prendre aucun chemin de traverse. Là, je suis un être fictif, donc je fais ce que je veux, je peux mentir un tant soit peu sur « ma vie », mon ressenti, mais jamais sur la procédure et l’affaire.
Après, pourquoi Ange-Clément, pourquoi un Apache ? Déjà juste pour le plaisir de placer un tout petit peu d’argot dans certains dialogues – un péché mignon ! -, ensuite nous sommes dans une époque criminogène, Lyon est le berceau de l’anarchisme, donc une source formidable pour un auteur. Et surtout cette théorie que c’est le milieu dans lequel on baigne qui nous forge, donc si l’on nous change de milieu, on peut changer…
L’évolution était prévue dès le départ de la série, c’est certes historique, mais je voulais un côté romanesque, que l’on ait de véritables affaires criminelles, mais aussi qu’Ange-Clément vive sa vie, que le lecteur d’un côté découvre des choses mais, d’un autre, qu’il se prenne d’affection pour Ange-Clément, qu’il ait envie de suivre ses aventures.
Plus qu’un simple roman, c’est un bel objet livre que tu nous offres ici, fruit d’un véritable travail d’équipe avec les éditions AFITT, mais aussi l’illustrateur Michel Montheillet et le Docteur Amos Frappa pour ne citer qu’eux : Peux-tu nous en dire davantage à ce sujet ? En quoi était-ce nécessaire à tes yeux ?
Avec Nicolas Delestre, l’éditeur, nous sommes passionnés par les vieux livres, et tout deux nous aimons les premières éditions de Jules Verne dans la collection Hetzel, illustrés par Georges Roux, c’est un peu l’idée que nous avions au départ, il fallait donc un illustrateur et, depuis quelques années, nous avions envie de travailler ensemble avec Michel Montheillet… Ensuite Nicolas a eu l’idée d’une postface d’un historien : Amos Frappa, spécialiste d’Alexandre Lacassagne et docteur en histoire de la police s’est imposé à nous, on ne pouvait trouver mieux, le tout agrémenté de photos d’époque. Le résultat ? Du roman policier historique 2.0…
Sais-tu déjà quelle affaire va prochainement nous occuper avec le Professeur Lacassagne et son fidèle assistant Ange-Clément ?
Oui, bien sûr, je le sais, mais je n’en parlerai pas. De toute façon, son nom ne dirait rien au grand public, elle est quasi inconnue, on y fait – une fois de plus – une découverte, mais Ange-Clément se retrouve bien embarrassé… Bref, j’espère que ce tome trois plaira autant au grand public que les deux premiers…
Question pêle-mêle : Quel est…
– Ton livre de chevet ? « Une seconde de toute beauté » de Frédéric Dard, je ne saurais dire le nombre de lecture…
– Le livre qui cale ta bibliothèque ? « Du côté de chez Swann » de Marcel Proust, je n’ai jamais réussi à le finir, pardon…
– Le livre que tu aurais rêvé d’écrire ? « La bête et la belle » de Thierry Jonquet, court, percutant et une fin…
– Ta lecture en cours ? « Ce qu’il faut de haine » de Jacques Saussey, à lire rien que pour ce lieutenant magnifique de l’IRCGN…
Si tu devais comparer ta vie à un roman, lequel serait-ce ?
« Le cave se rebiffe » d’Albert Simonin…
Un petit mot pour la fin ?
Merci ? Oui, c’est bien, merci, comme dernier mot… Merci pour le temps que tu passes à partager ta passion de la littérature, à nous mettre en avant, nous autres hommes et femmes qui aimons a raconter des histoires, sans des gens comme toi et les libraires, nous ne sommes rien…
C’est moi qui te remercie chaleureusement pour ces petits mots qui me vont droit au cœur ! Si vous avez déjà lu les premiers titres de la série “Surin d’Apache“, j’espère que cette petite interview vous a permis d’en apprendre davantage. Si vous ne les avez pas encore lus… C’est le moment de vous ruer en librairie pour en savoir plus !