On n’écrit bien qu’avec le cœur. L’essentiel est invisible pour la plume. Antoine de Saint Exupéry me pardonnera sûrement d’avoir quelque peu détourné l’une de ses plus célèbres citations à l’heure où j’écris ces quelques lignes, tout à la fois émue et ravie mais aussi bien en peine de faire renaître cette petite rubrique bigrement atypique et incontestablement chérie, que j’ai pourtant mise en pause depuis maintenant… Trois ans… Oui mes Bookinautes chéris, trois longues années se sont écoulées depuis mon dernier article, alors consacré à Carène Ponte… Si la faute pourrait très logiquement et trop facilement être attribuée à la Covid avec la crise sanitaire que ce virus a entraînée, cela n’est pas tout à fait vrai et je tiens à assumer ma large part de responsabilité : Parce qu’une telle rubrique ne nécessite pas seulement du temps mais aussi de l’envie, et surtout cette petite étincelle susceptible d’embraser mon grain de folie dont j’ai incontestablement besoin pour me lancer dans cette étrange expérience livresque…
Et ce petit brin de magie, je l’ai déniché au détour de la “Rue du Rendez-vous“, ce merveilleux roman paru aux éditions Plon en mai dernier… Ce petit brin de magie, je l’ai croisé dans le regard éteint d’Alice Beausoleil, je l’ai dégotté dans la boutique de Marcel Dambre, je l’ai découvert dans mes propres larmes à la page 373… Cette rubrique devait renaître, en la seule et unique compagnie de Solène Bakowski ! Seulement de mai à novembre, cela paraît bien long pour une résurrection : Que s’est-il donc passé, me demanderez-vous ? J’ai tout simplement changé de service et manqué de visibilité dans mon emploi du temps ! Je me suis tout de même lancée à la rentrée en contactant Solène afin de lui faire part de mon souhait, souhait qu’elle a exaucé en acceptant immédiatement ma proposition ! Ne restait plus qu’à convenir d’une date pour concrétiser ce projet fou, et le destin a voulu que nos agendas respectifs se calent au 13 novembre : Un bien joli pied de nez à l’obscurantisme, une humble façon de rendre hommage à ceux qui sont tombés pour rappeler que Paris est une fête et que la vie continue, n’en déplaise aux méchants !
C’est ainsi que je me suis levée ce samedi matin, fatiguée et pourtant toute guillerette à l’idée de retrouver Solène. Elle m’avait donné rendez-vous non pas “Rue du Rendez-vous” mais à la Cité Universitaire à 11h00, en me conseillant de me préparer à faire un peu de marche à pied : Aucun problème pour votre blogueuse déjantée qui adore marcher sans toutefois renoncer à ses jolies jupettes : C’est donc chaussée de mes baskets, parée d’une robe et d’un collant polaire que j’ai débarqué à la Gare de Beauvais pour grimper à bord du “TER à destination de Paris Nord. Il desservira les gares de Saint-Sulpice / Auteuil, Laboissière / Le Déluge, Méru, Esches, Bornel / Belle Eglise, Chambly et Persan Beaumont” pour ensuite rejoindre le RER B… Qui se cachait alors voie 44 alors qu’il est habituellement à quai voie 42 : Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué à la RATP ? Toujours est-il que je ne me trompe pas et parviens à destination avec quelques minutes d’avance et autant de gouttes de pluie que je menace d’un regard : C’est qu’il ne s’agirait pas de gâcher notre journée de marche ou je pourrais me fâcher !
A l’heure convenue je retrouve avec bonheur ma chère Solène Bakowski ! Une joie que je partage très brièvement sur les réseaux sociaux par le biais d’une photo avant de me laisser embarquer par cette adorable autrice à la découverte de cette Cité Universitaire dans laquelle je m’étonne tout d’abord de pénétrer : Solène m’explique alors que la “Cité Internationale Universitaire de Paris” n’est pas une simple université mais une fondation regroupant tout un tas de magnifiques bâtiments érigés par différents pays au fil des années, dans lesquels résident nombre d’étudiants, professeurs, chercheurs venus de l’étrangers. Si sa vocation est de contribuer à l’entente entre les peuples, on peut allègrement s’y promener et admirer les différents types d’architecture, et c’est précisément ce qu’elle me montre tandis qu’on déambule dans les allées tout en découvrant nos propres cursus universitaires et nos projets de jeunesse qui n’étaient pas si éloignés mais plus aboutis chez elle que chez moi qui manque cruellement de confiance en moi. C’est ainsi que je découvre son amour pour la Chine, sa langue et sa culture, autant d’éléments qu’elle a étudiés et qui l’ont conduite à séjourner en Chine à plusieurs reprises avant de revenir définitivement en France… Parce qu’on a beau s’enrichir des autres, nos racines sont aussi notre force et notre énergie ! C’est d’ailleurs à l’occasion de son dernier voyage en Chine qu’elle s’est sérieusement lancée dans l’écriture d’ “Un Sac“, son tout premier roman dont elle n’avait écrit que quelques pages en France à la suite d’une dispute… Le début d’une (autre) grande et belle aventure…
Tout en discutant nous quittons la Cité U pour rejoindre le Parc Montsouris situé juste à côté, dans lequel on peut encore promener son chien : Un détail d’importance pour l’une et l’autre puisque nous avons toutes les deux un compagnon canin de la même race et du même tempérament : Le petit Yorkshire pépère et un brin braillard, qui aime à faire le caïd des bacs à sable quand l’occasion vient à se présenter ! Si le sien semble peut-être un peu plus sage et calme que le mien, notre amour pour nos bêtes est tout aussi incommensurable et, cette fois encore, nous nous comprenons… Tout en parlant de la Chine et des animaux, nous abordons aussi la famille, je lui parle de mon récent mariage, elle me parle de sa grossesse qui a alors bouleversé sa vie… L’occasion d’ailleurs de revenir en Chine, pays dans lequel elle s’est donc installée et dont elle me relate les us et coutumes, mœurs et habitudes qui peuvent parfois compliquer le quotidien…
L’heure tourne et nos estomacs commencent à se manifester, aussi nous rejoignons tranquillement la place puis la rue Denfert Rochereau afin de nous restaurer… Dans un restaurant asiatique, afin de mieux poursuivre le fil conducteur de notre belle histoire du jour ! Tout en déjeunant, nous papotons de nos quotidiens respectifs… Du mien qui s’avère parfois difficile et en tout cas plus incertain et mouvementé tandis que le sien est un peu mieux réglé, calé sur l’emploi du temps de sa fille et adapté à son métier d’autrice : Ainsi elle écrit le matin, se fait rappeler à l’ordre par son chien si d’aventure elle venait à oublier l’heure de la promenade quotidienne, car elle a aussi besoin d’activité physique et sportive donc elle marche énormément, se plaît à déambuler, seule ou accompagnée, dans Paris et ses cimetières, sans oublier un peu de relaxation pour une vie la plus saine et sereine possible…
Après le déjeuner, c’est donc dans un célèbre cimetière parisien que nous allons nous promener, celui du Montparnasse. Avec la Tour pour horizon, nous parcourons les différentes allées sobrement décorées par l’automne et nous découvrons d’innombrables tombes, plus ou moins anciennes, plus ou moins entretenues… Loin d’être sinistre, la balade est belle et apaisante, presque rassérénante : Dans le repos éternel, les morts veillent sur nous et nous apportent une certaine quiétude et leur ultime demeure nous parlent, nous évoquent des souvenirs qu’on leur prête bien volontiers… C’est ainsi que nous parlons du deuil et de notre appréhension de la mort… C’est ainsi que nous parlons aussi de sa fascination pour les cimetières qui, contrairement à ce qu’elle pensait, ne m’inquiète pas outre mesure et me fascine à mon tour. Nous en venons justement à parler des notions d’enterrement et d’incinération, de besoin de recueillement encore, de mémoire aussi… Elle me parle des différents cimetières qu’elle a pu visiter, notamment pour les besoins de son roman en cours d’écriture… Dès lors nous embrayons justement sur l’écriture et l’édition, autant de démarches abstraites tant qu’on ne s’y est pas frotté, autant d’aventures qui demeurent complexes une fois qu’on s’est laissé embarquer !
Nous quittons le Cimetière du Montparnasse et traversons par le Jardin du Luxembourg ou un fou rire nous prend lorsque nous croisons des enfants en train de jouer au ballon pour la deuxième fois de la journée… Un ballon en cuir que nous craignons de recevoir si jamais l’un des gosses loupait son lancer… Un ballon en cuir qui pourrait bien nous fracasser la tête, une péripétie bien dangereuse… Mais tellement plus digne qu’un ballon en mousse tout dégueu du fait de la pluie qui s’écrabouillerait alors contre notre visage dans un atroce bruit spongieux… Oui le sol était très humide mais la pluie nous a relativement épargnées, aussi nous avons poursuivi jusqu’au Panthéon, lieu si symbolique dans “Un Sac“, son premier roman dont je ne peux que vous conseiller la lecture ! Nous revenons justement à ce livre, de sa genèse à sa publication, d’abord en autoédition où il se fait remarquer et reçoit bientôt un Prix Spécial du Jury des Plumes Francophones ! Elle me parle aussi de Lila, son agente et amie, une personne précieuse et essentielle quand on est écrivain et, tandis que nous nous gagnons la rue Mouffetard qu’elle apprécie particulièrement pour ses airs de “Village parisien”, nous parcourons en même temps le reste de sa bibliographie : De “Parfois on tombe” à “Une bonne intention” en passant par “Chaînes” et “Miracle“, nous évoquons également son aventure à quatre mains avec Amélie Antoine avant revenir à son arrivée chez Plon et ce magnifique roman qu’est “Rue du Rendez-vous“…
A défaut d’une crêpe au nutella, c’est un délicieux chocolat chaud que nous dégustons à l’occasion d’une petite pause au Starbucks ! J’en profite justement pour lui faire dédicacer un exemplaire de son dernier roman afin de vous l’offrir à l’occasion de mon Avent Livresque, tant j’ai apprécié, aimé, adoré cette lecture si passionnante et bouleversante. Nous en profitons pour en reparler car je ne tarirai jamais d’éloges sur ce livre, l’un des rares pour ne pas dire le seul à m’avoir fait tant pleurer… S’il est des romans qui vous touchent, celui-ci m’a terrassée.
Après cette petite pause bien méritée, nous reprenons la marche tandis que le jour commence à décliner. Nous gagnons le quartier chinois qui a bercé son enfance et dont elle me parle avec beaucoup de bienveillance, nous en savourons les senteurs, admirons les lumières, ressentons les vibrations avant d’évoquer les immeubles que nous découvrons ensuite… Si j’en dis qu’il est malheureux d’empiler les gens ainsi, elle me dit qu’au contraire qu’il faut en admirer la poésie urbaine à travers ses lumières : Je n’avais jamais vu les choses ainsi, c’est joliment dit et cette vision me plaît assez. Nous croisons l’inénarrable Boulinier avant de rallier la Cité Universitaire et sa gare RER : Avec un total de 24 km à travers Paris, la boucle est allègrement bouclée, le bonheur de cette journée immense, les souvenirs à jamais gravés… Aussi je remercie chaleureusement Solène de m’avoir consacré cette journée qui n’a fait que renforcer mon estime comme mon affection à son égard. Si le RER et ses habituels difficultés de trajets m’ont fait louper mon train, les étoiles n’ont pas quitté mes yeux comme mon âme de lectrice passionnée : J’ai passé une excellente journée et j’espère très sincèrement avoir su vous la faire vivre à mon tour à travers ces quelques lignes : J’irai bloguer chez vous est relancé, c’était avec Solène Bakowski pour une journée absolument unique et magique, ce dont je lui suis éternellement reconnaissante !