L’amour rend aveugle… Le roman noir rend la vue : “La Faussaire” de Patricia Delahaie, initialement publié aux éditions Belfond Noir avant de s’offrir une seconde vie aux éditions Pocket.
Le pitch : Elle était sa vie, son amour, sa Marilyn. Il a exaucé tous ses vœux. Même le pire. La cinquantaine, père et mari aimant, Paul Ménard est un médecin dévoué. Jusqu’à ce jour de 1997 où son regard croise celui d’une femme éblouissante. Camille. Paul veut la sauver. Il va prendre une décision irréversible…
C’est un peu par hasard que j’ai croisé la route de Patricia Delahaie. Pour ses dix ans, le Festival sans nom proposait un petit album de dédicaces, que j’ai donc fait signer à chacun des auteurs présents sur le salon, parmi lesquels Patricia Delahaie que je ne connaissais pas. Pas encore. L’occasion idéale pour discuter et découvrir son premier roman dont je me suis procuré un exemplaire avant de quitter Mulhouse ! Si j’ai tardé à me plonger dans cette lecture, je me suis laissée surprendre par cette chronique d’un drame annoncé menée de main de maître par une autrice inspirée.
S’éloignant de toute trame classique, l’autrice s’est emparée d’un fait divers pour en livrer une fiction assez déconcertante, délaissant le suspense au profit de la psychologie de ses protagonistes afin d’explorer les aspects judiciaires mais aussi sociaux ou sociétaux, et plus encore humains. En résulte cette intrigue remarquablement maîtrisée sur l’art de la manipulation, oscillant entre roman noir et “thriller journalistique”.
Comment un homme bien sous tous rapports peut en venir à commettre l’irréparable pour les beaux yeux d’une femme dans une tranquille petite bourgade de province ? Incompréhensible et impardonnable, me direz-vous… Mais l’autrice prend donc le contrepied de ce qu’on peut lire habituellement pour aborder – sans justifier – le drame en amont et de l’intérieur, pour l’appréhender en profondeur et dans son ensemble jusqu’à la condamnation, la reconstruction, la réinsertion sans oublier d’évoquer ses “dommages collatéraux”.
L’histoire est d’autant plus machiavélique et saisissante qu’elle est servie par une plume fluide, élégante et entraînante, un style sur le vif, très actuel et facile à lire.
En bref, l’exercice était périlleux mais Patricia Delahaie a relevé le défi avec brio en réalisant ce portrait d’un fait divers avec une telle justesse !