Chroniques 2025 \ Les dames de guerre – Tome 1 : Saïgon de Laurent Guillaume

Saïgon, nid d’espions : « Les dames de guerre – Tome 1 : Saïgon » de Laurent Guillaume, initialement paru aux éditions Robert Laffont dans la collection La Bête Noire le 29 février 2024 et désormais disponible en version poche aux éditions 10/18, lauréat du Prix Bête Noire des Libraires 2024.

Le pitch : Septembre 1953, New York. La rédaction de Life magazine est en deuil. Son reporter de guerre vedette, Robert Kovacs, a trouvé la mort en Indochine française laissant derrière lui un vide immense.
Persuadée que sa disparition n’a rien d’accidentelle, Elizabeth Cole, photographe de la page mondaine, décide de lui succéder et réalise ainsi son plus grand rêve : devenir correspondante de guerre.
C’est le début d’une enquête à l’autre bout du monde, au cœur d’un écheveau d’espions, de tueurs à gages, de sectes guerrières, d’aventuriers, et de trafiquants d’armes. À Saigon, Hanoï, sur les hauts plateaux du Laos, Elizabeth va rencontrer son destin en exerçant son métier dans des conditions extrêmes et affronter les pires dangers.
Plonger dans un roman de Laurent Guillaume, c’est souvent se confronter à ce que la société, d’hier et d’aujourd’hui, recèle de plus sombre en son essence. En témoigne la série « Mako » et « Black Cocaïne » ou, plus récemment et sidérant encore, « Un coin de ciel brûlait », sans aucun doute mon roman préféré de cet auteur qui ne m’a pourtant pas épargnée. J’étais donc curieuse et déterminée à m’immiscer parmi « Les dames de guerre », peu importe dans quel guêpier j’allais me fourrer, trop passionnée pour ne pas me laisser emporter, pour le meilleur… Et pour le pire à n’en point douter.

Fort d’un redoutable travail de recherche et de documentation, l’auteur nous entraîne sans délai ni ménagement au cœur d’une intrigue mêlant brillamment tout ce que la littérature noire recèle de meilleur, conjuguant habilement Histoire, aventure et espionnage sans oublier un tourbillon d’informations et d’émotions. Si le récit se veut remarquablement immersif, tant par la justesse de son atmosphère et de ses décors, son ancrage dans la dimension géopolitique et historique, il s’avère terriblement humain aussi, de par la complexité des relations qui se nouent entre l’ensemble de ses protagonistes, pour le moins complexes voire ambivalents.
Pour nous lancer à la conquête de ce roman incontestablement dense et foisonnant, qui ne manque décidément pas de révélations et de rebondissements, l’auteur nous présente Elizabeth Cole, journaliste de la page mondaine du célèbre magazine Life. La revue vient de perdre l’un de ses plus précieux éléments, le correspondant Robert Kovacs, et la jeune femme se propose de le remplacer. D’abord raillée par ses collègues masculins, qui n’ont pourtant pas eu son courage, la jeune femme se voit adoubée par son patron et propulsée en Indochine sans vraiment savoir où elle met les pieds… A l’instar de son lecteur, ce qui nous la rend d’autant plus précieuse, proche et attachante. Loin de se laisser abattre, notre héroïne montrera qu’elle en a l’étoffe et les attributs, forcera le respect par sa témérité, tant à prouver sa valeur et s’imposer dans ce milieu débordant de testostérone qu’à rendre justice et révéler la vérité au monde entier.
Si je craignais de m’égarer au cœur de ce pan d’Histoire que je ne connais… Très peu, même pas du tout, pour tout vous avouer, c’est mal connaître le talent de l’auteur à maîtriser son intrigue, aussi complexe soit-elle, à combiner réalité et fiction pour mieux nous enrichir, nous émouvoir, nous captiver. De la même manière que notre héroïne, on se révolte autant qu’on prend tous les risques pour comprendre à défaut d’admettre. Les enjeux se dévoilent en même temps que les vrais visages, l’enquête est aussi fascinante que sidérante, et c’est groggy qu’on referme ce livre, porté par une plume brute, efficace et authentique, un style vif et percutant qui m’a tenu en haleine de la première à la dernière ligne.

En bref, je n’ai que trop tardé à vous parler de cet ouvrage saisissant, bel hommage aux reporters de guerre par ailleurs. Maintenant que je me suis rattrapée, je suis fin prête à affronter le second tome de cette trilogie et remercie vivement l’auteur pour cette épopée dangereusement palpitante et gorgée d’éléments instructifs… Tel est pris qui croyait prendre !

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