“Méfie-toi de l’eau claire” : “Paranoïa” de Lise Charles, paru le 21 août 2025 aux éditions P.O.L.
Le pitch : Sans réfléchir, j’ai raconté que j’avais tué ma sœur. Un murmure s’est fait entendre dans le public, il m’a semblé que c’était un murmure d’admiration.
C’est avec une certaine émotion que je publie ce dimanche ma dernière chronique pour le salon des Livres dans la Boucle qui se tient à Besançon jusqu’à ce soir. Il me reste bien quelques bouquins à évoquer dans le cadre de ce festival littéraire, mais ils sont signés du même auteur, pour mon seul plaisir de découvrir plus avant sa bibliographie. Mais je ne connaissais pas Lise Charles avant qu’on me propose de modérer sa table ronde en sa compagnie, avec Jacques Expert et Virginie Noar. Ce fut donc une nouvelle découverte et une fois encore un approfondissement de mes horizons littéraires…
Difficile de vous parler de ce roman tant il s’avère malicieux et déroutant, gorgé de littérature tout en démarrant avec “Copains des bois“. Entre réalité un brin fantasque et dimension parallèle qu’on ne parvient pas à situer, qui relève sans doute du rêve ou de la folie, la lecture de cet ouvrage nous fait l’effet d’être Alice qui s’engouffre à la suite du Lapin blanc dans son terrier pour atterrir au Pays des Merveilles… Qui ne l’est pas tant cette fois-ci.
Parce que Louise, dont on suit cette tranche de vie, est une enfant star qui a vu la série dont elle était l’égérie s’arrêter à la suite d’un scandale. Dès lors elle reprend le cours de son existence au lycée et (ré)apprend les rudiments de la normalité… Jusqu’à ce qu’un drame fasse basculer ce fragile équilibre et défie la raison du lecteur comme de son héroïne.
A travers ce récit, Lise Charles interroge l’identité qui évolue tandis que la vie défile à vitesse grand V et nous fait changer au gré des saisons, au gré des années. Elle brouille admirablement les pistes au point de se demander parfois si elle parle d’elle-même ou de son jeune personnage, tant elle nous interpelle et joue d’un redoutable effet miroir. Alors on se laisse porter… Et à notre tour on se raconte une histoire.
C’est assez déconcertant et énigmatique, c’est original et atypique, servi par une plume riche, élégante et soignée, un style hypnotisant porté par les œuvres dont cette intrigue se fait l’écho, pour une lecture qui marque, à défaut d’être parfaitement comprise.
En bref, l’esprit a ses raisons que la lecture ne connaît point : C’est une drôle d’expérience littéraire que Lise Charles nous propose ici, un audacieux conte métaphysique.
