Chroniques 2025 \ Emprises de Salvatore Minni

Quand l’amour fou tourne au vinaigre : “Emprises” de Salvatore Minni, paru le 06 mars 2025 aux Presses de la Cité.

Le pitch : Après seulement quelques semaines de relation, Catherine épouse Frédéric malgré les réserves de son entourage. Mais très vite, l’idylle tourne au vinaigre et une facette beaucoup plus sombre émerge derrière le sourire séducteur et les belles paroles. De tortures morales en maltraitances physiques, Frédéric n’a de cesse d’isoler et de détruire à petit feu celle qu’il dit aimer par-dessus tout.
Une fois le confinement déclaré, Catherine, piégée, n’a d’autre choix que de se libérer de ses propres démons pour échapper aux griffes de cet homme.

En pure lectrice passionnée qui se respecte, j’ai souvent – Que dis-je ? Toujours ! – les yeux plus grands que la PAL… Ou justement non : Une PAL plus grande que mes yeux peuvent en bouquiner sur une année, une décennie et même toute une vie… Aussi et malgré ma boulimie littéraire pleine et entière, franche et assumée, j’ai – Et j’aurai – sans cesse du “retard” et un immense sentiment de frustration de ne jamais parvenir à lire tout ce que je souhaite au moment où je le souhaite.
Tout cela pour vous dire que le bouquin dont je m’apprête à vous parler, je l’ai guetté dès sa sortie, je me le suis procurée à PolarLens en mars dernier pour le lire “sans délai”… Et il se trouve dans ma “PAL imminente” depuis lors, juste à côté de mon lit ! Pourquoi diable sommes-nous obligés de dormir quand les journées ne durent que 24 heures ?!

Ou bien serait-il possible que j’aie senti le danger ? Quoi qu’il en soit, l’ouvrage a fini par s’imposer, se glisser entre mes mains pour que je puisse enfin m’y plonger… Et ça n’a pas loupé : sur moi le piège s’est ainsi refermé…

Loin de céder à la facilité, Salvatore Minni nous prouve une fois encore qu’il est passé maître dans l’art du thriller psychologique en nous offrant une lecture particulièrement prenante et éprouvante. Bien que classique et récurrent en littérature noire, l’auteur s’empare du délicat sujet du phénomène d’emprise au gré d’une relation toxique afin de l’aborder de façon plus percutante et insidieuse, disséquant l’ensemble de ses mécanismes, suggérant l’ensemble de ses ravages, explorant l’ensemble de ses failles à travers une galerie de portraits minutieusement croqués. En résulte une lecture qui touche à l’âme, bat au cœur et prend aux tripes, parce qu’elle nous force à voir, ressentir, vivre, ce qu’on préfère éviter, ignorer, oublier. Et si Savlatore Minni “profite” du confinement pour ajouter à l’enfermement physique et psychologique, ce n’est que pour mieux nous ancrer dans la réalité, dans la vérité… Et nous submerger plus encore. D’amour et de haine, d’angoisse et de révolte, d’apathie et de douleur, de résilience et de rancœur, de doute et de déroute.
Tout en restant dans une sidérante sobriété, l’auteur frappe fort, très fort, nous malmène avec une effroyable douceur pour nous hanter plus longtemps, nous étouffe avec une saisissante froideur pour nous marquer au fer rouge durablement. Dès lors on ne peut s’empêcher de tourner les pages, avides que l’on est de savoir à défaut de comprendre, au gré de ces chapitres tout à la fois addictifs et malaisants, nauséeux et palpitants, tant leur tension est forte mais leur justesse dérangeante. Car rien n’est tout noir ni tout blanc mais bien plutôt tout en nuances, et c’est ce qui nous ébranle d’autant plus, sous le coup de cette plume nerveuse et glaçante jusqu’à un dénouement qui nous laisse sans voix ni souffle, ébaubi et abasourdi.

En bref, redoutable et poignant roman que celui de Salvatore Minni dont l’emprise porte un “s” à plus d’un titre… Machiavélique !

Laisser un commentaire