Essai transformé par auteur inspiré avec ce thriller endiablé d’une rare efficacité : “Au Royaume des Cris” de Mathieu Lecerf, paru en mars dernier aux éditions Robert Laffont dans la collection La Bête Noire.
Le pitch : Alors qu’un mystérieux sniper fait six victimes en plein cœur de Paris dans ce qui s’apparente très vite à un attentat, Esperanza Doloria n’est plus que l’ombre d’elle-même depuis la disparition de Mia, qu’elle ne cesse de chercher… Deux affaires sordides et délicates pour le Capitaine Manuel De Almeida, encore convalescent et hermétique aux hypothèses de son journaliste de son frère Cristian, qui explore dès lors ses propres pistes…
C’est avec un léger retard que je découvrais la plume de Mathieu Lecerf l’an dernier… J’avais pourtant repéré “La part du démon” dès sa sortie mais je n’ai rencontré l’auteur qu’en novembre lors du salon “Noir sur Ormesson“… Un léger retard qui ne m’a pourtant pas empêchée de me sentir frustrée une fois cette lecture terminée, les dernières pages m’inspirant même une légère envie de frapper ce primo romancier puisque le second opus n’était pas encore publié… Il m’aura encore fallu attendre mes congés d’été pour m’y plonger dans les meilleures conditions possibles malgré sa parution en mars… Et ce jour est ENFIN arrivé !
En préambule je vous conseillerai vivement de lire “La part du démon” avant de vous embarquer “Au Royaume des Cris” si jamais ce n’était pas encore fait pour une parfaite appréhension des personnages comme du postulat de départ… Vous en priver serait gâcher et constituerait un véritable crime littéraire que je ne saurais tolérer !
Se glissant dans les pages de son aîné, ce nouveau bouquin d’une remarquable noirceur nous entraîne dans une double enquête particulièrement bien pensée et redoutablement maîtrisée. Si l’auteur adopte une structure narrative plus classique – et encore que… -, ce n’est que pour mieux nous happer dans une intrigue prenante et sidérante sans nous laisser le moindre temps mort, le moindre répit. Dès lors on tourne les pages avec une certaine frénésie, avide que l’on est de savoir ce qu’il advient de nos protagonistes.
Car l’atout majeur de ce récit reste incontestablement ses personnages, minutieusement construits et étoffés en substance, ce qui les rend profondément humains en plus d’être parties prenantes aux deux affaires. On a fait leur connaissance dans “La part du démon” pour la plupart, aussi c’est avec plaisir et empathie qu’on les retrouve ici, qu’on vibre, qu’on tremble, qu’on bouillonne, qu’on s’inquiète, qu’on s’agace, qu’on s’émoustille… Qu’on vit pleinement toutes ces péripéties à leurs côtés.
Mais si l’on vit plus qu’on ne lit cette histoire, c’est aussi parce qu’on la voit, tant la plume de l’auteur est fluide, dynamique et bigrement visuelle, son style tout à la fois haletant, entraînant et scénaristique, son empreinte littéraire indéniablement cinématographique pour une lecture d’autant plus immersive et addictive !
En bref, c’est un doublé dense et corsé franchement réussi que l’auteur nous offre à travers ce deuxième polar décidément saisissant… Le plus dur à présent, c’est de ronger son frein jusqu’au troisième roman !